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Appelons un chat un chat

Appelons un chat un chat

Dans cette somme d’essais, publiée en 2019 aux États-Unis, la penseuse du mansplaining (Ces hommes qui m’expliquent la vie, Points 2021) revient sur le climat politique qui a accompagné la première élection de Trump. C’est à un pas de côté que ces courts textes nous invitent, remonter pour une fois le flux médiatique, et prendre la doxa à sa source. On retrouve la prose de Solnit, imagée, profonde, et toujours teintée d’un humour ressourçant par les temps qui courent. Signalons également son Journal d’une inexistence, paru en 2022 déjà chez l’Olivier, qui sous la forme d’un essai autobiographique et sensible se retournait sur les violences qui jalonnent toute trajectoire féminine dans nos sociétés patriarcales, violences dont notre culture dans son ensemble est tissée. Par son travail Rebecca Solnit nous entraîne dans une réflexion qui tire des fils. Salutaire.

Appelons un chat un chat – L’Amérique en crise , Rebecca Solnit, Éditions de l’Olivier, novembre 2024, 14,90€.

Champs de bataille

Champs de bataille

Avec cette enquête graphique, Inès Léraud, journaliste bretonne déjà au centre du cyclone autour des algues vertes donne à voir et à penser les mutations imposées au monde paysan et aux paysages ruraux dans le chaos de l’après-guerre. Page après page, on découvre que ce qu’on savait être un désastre pour la biodiversité a scindé des communautés où l’entraide avait jusque-là primé. On apprend aussi la place du régime de Vichy dans ce saccage, et on comprend mieux l’actuel rôle de gestion réactionnaire de la FNSEA. Les pages qui reprennent les doléances des agriculteur·trices récalcitrant·es et les refus qu’on leur oppose sont particulièrement éloquentes. Comme lire ce recruteur des usines Citroën de Rennes se vantant d’avoir pu grâce au concours de la préfecture et de l’INRA disposer du vivier des paysans laissés sur le carreau par le remembrement. C’est une BD riche et émouvante, à mettre sous le sapin des écolos en voie de radicalisation, pour achever leur conversion.

Champs de bataille , Inès Léraud et Pierre Van Hove, La Revue Dessinée/Delcourt, novembre 2024, 23,75€.

Comment les riches ravagent la planète

Comment les riches ravagent la planète

Cette BD très (trop ?) pédagogique prend le contrepied du pontifiant Jancovici, pape de la décarbonation et égérie pronucléaire des ingénieurs ni de gauche ni de droite, et met au jour en passant la dimension profondément réactionnaire des essais de l’historien Yuval Noah Harari, idole du pékin ni de gauche ni de droite mais un peu de droite quand même. L’offensivité du propos se renforce à mesure qu’on progresse dans sa lecture. À offrir en lieu et place du Monde sans fin ou de Nexus. Joyeux Noël !

Comment les riches ravagent la planète – Et comment les en empêcher , Hervé Kempf et Juan Mendez, Seuil, septembre 2024, 20€.

Avant Long Island

Pour savoir pourquoi Ellis Lacey est bloquée à Long Island, dans le roman éponyme présenté dans la revue de septembre, pour savoir pourquoi ce mariage raté et cette vie dévastée, on peut lire ce qui est le tome I de cette histoire.

En effet Colm Toibin a écrit Brooklyn , le début de cette saga en 2009.

Le roman débute dans les années 1950, Ellis, jeune fille timide et effacée, vit dans une petite ville très refermée sur elle-même, et comme de nombreuses jeunes irlandaises, ne parvient pas à trouver du travail.

Sa mère et sa sœur, par l’entremise d’un prêtre, lui trouve un emploi aux États-Unis, à Brooklyn.

Poussée par sa famille, Eilis s’exile à contre-cœur et est d’abord submergée par le mal du pays, mais loin de sa famille et du poids social, elle découvre, la liberté et l’amour auprès d’un jeune italien.

Mais un drame familial l’oblige à retraverser l’Atlantique. Une fois de retour au pays, victime de son éducation et des préjugés inculqués par la religion, qui pèse d’un poids terrible sur la société, elle repart en refusant de donner suite à l’amour qu’elle a trouvé.

Note de la responsable de rubrique, je n’ai lu de ces lignes que les premières, les suivantes risquant de divulgâcher ma future lecture de Brooklyn, mais si je puis me permettre, rater son mariage, c’est probablement la meilleure chose qu’on puisse souhaiter à une femme. Et bonne année !

Brooklyn , Colm Toibin, Livre de Poche 384 pages 8,90€.