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À mon frère le paysan

À mon frère le paysan

Ce court texte de 1899, d’abord édité sous forme de brochure par le journal anarchiste Les Temps Nouveaux, est ici accompagné de dessins de Clément Vuillier qui disent aussi bien la richesse du vivant que la pauvreté des processus d’accumulation. Dans ce réquisitoire contre l’industrialisation de l’agriculture, préfacé par l’historien Johann Chapoutot, Reclus invite les paysans à cultiver les communs comme rempart à l’expansion de quelques-uns. On pense à la BD d’Inès Léraud. C’est une ode à la terre, à la fraternité, à la camaraderie. Terrible et visionnaire.

“Ce que tu cultives mon frère est à toi, et nous t’aiderons à le garder par tous les moyens en notre pouvoir ; mais ce que tu ne cultives pas est à un compagnon. Fais-lui de la place.”

À mon frère le paysan , Elisée Reclus, Reliefs, novembre 2024, 36 p., 14,90€.

For-ever-ism

For-ever-ism

Cet essai s’ouvre sur la répression du sentiment nostalgique, projet qui occupera les penseurs du début du XXe siècle, où l’on ne peut tolérer que quelque sentimentalisme vienne s’opposer à la ferveur militaire. Au fil des moments de ce court texte, Grafton Tanner propose une thèse selon laquelle :

•nous sommes apparemment entourés d’objets de nostalgie ;

•à bien y regarder, il s’agit d’épigones ;

•ceux-ci ont vocation à conjurer l’émotion nostalgie, cette fois au service des impératifs capitalistes ;

•ce foreverism va de pair avec le nowism d’une époque éternellement plongée dans l’instant.

“Rien ne hante cet instant éternel, aucun fantôme n’y fait cliqueter ses chaînes. Exister dans un néant foreverisé signifie ne jamais mourir, produire et livrer concurrence sous des regards vigilants, errer dans un univers infini où les conversations ne se terminent jamais, en se demandant quand le printemps va arriver.”

For-ever-ism , Grafton Tanner, Façonnage éditions, novembre 2024, 120 p., 14€.

La Pythie vous parle

La Pythie vous parle

Dans ce dernier opus, l’autrice suédoise réunit tous les ingrédients qui ont fait le succès de ses BD féministes : vulgarisation de sociologues, de philosophes et de psychologues incarnée par des personnalités publiques, et humour décapant au service d’une implacable dénonciation du libéralisme qui vient s’insinuer jusque dans nos relations. En sept chapitres qui en font un ouvrage assez épais, de quoi faire durer le plaisir, elle nous invite à prendre à contrepied les préceptes du développement personnel dont nous sommes abreuvés. Adorno, Zygmunt Bauman, Hartmut Rosa, Doris Lessing, Lacan et Max Weber sont dans un bateau, et ça détend. Pour celleux qui ne connaissent pas encore, nous prescrivons la lecture des Sentiments du Prince Charles chez le même éditeur. Lecture à réitérer chaque semaine pour les hommes cis, pour une meilleure assimilation.

La Pythie vous parle , Liv Strömquist, Rackham, nov. 2024, 244 p.,25€.

Les Filles de la passion

Les Filles de la passion

Maggy fait grève. Voilà douze jours qu’elle a cessé de s’alimenter. Maggy est en prison. Maggy est une terroriste. Entre souvenirs et hallucinations on la suit dans son enfance au couvent des Filles de la passion. On l’accompagne dans ses amitiés sinueuses. Avec Dizzie, qui lui apprend que la franchise est une option. Avec Rosheen, frappée par son mari. L’IRA est dans le paysage mais Maggy se tient à distance, elle a une thèse à terminer. De sémiologie. Le sens ça n’est pas dans une vie de femme qu’on le trouve. Alors Maggy tue parce que c’est une option. Comme la franchise.

“Maggy cracha sur lui. C’était un geste étrange et barbare, mais, en y repensant, elle éprouvait à nouveau la colère de la jeune couventine devant cette atteinte à la dignité et savait que c’était le minimum pour qu’elle se défoule. Si on lui avait donné un couteau, elle aurait poignardé cet homme. Il dut voir de la folie sur son visage car il essuya le revers de sa veste et s’éloigna sans piper.”

Les Filles de la passion , Julia O’Faolain, Les éditions du Portrait, avril 2023, 8,90€.