Le congrès national du SNES s’est poursuivi aujourd’hui vendredi, avec les débats autour de la question de la syndicalisation. Pour Emancipation mais aussi pour nombre de congressistes, on ne peut poser cette question sans la relier à celle de l’orientation syndicale. Là aussi, il y a des évolutions par rapport au texte d’entrée de congrès, malheureusement ils ne changent pas vraiment la conception du syndicalisme qui est développée. Nous reproduisons ci dessous les interventions des délégué.es d’Emancipation sur nos motions (syndicalisme, droits et libertés), et amendements (précarité, caisses de grève, AG souveraines et auto-organisation).
Intervention Emancipation : présentation de la motion générale sur le syndicalisme
Le thème retenu par la direction nationale pour ce congrès est la syndicalisation, or on voit bien que la question de la syndicalisation renvoie d’abord et avant tout à la question de l’orientation syndicale : l’orientation syndicale déterminer comment un syndicat se construit, et quelles seront ses pratiques syndicales.
Le sens de notre motion, est de développer quel type de syndicalisme devrait porter le SNES. Pour nous, le syndicat se construire selon trois axes principaux :
1) s’inscrire dans une perspective de changement social : le SNES et la FSU sont provisoirement dans l’autonomie, mais le sort de nos professions est étroitement lié à celui des autres catégories de travailleurs. De ce point de vue, nous devons continuer à nous inscrire dans l’idée fondatrice du syndicalisme confédéré, à savoir qu’il y a dans cette société des classes antagonistes avec des intérêts irrémédiablement opposés.
2) développer un syndicalisme qui parte de la base, qui rompt avec la délégation de pouvoir. De notre point de vue, on ne peut pas répondre à la liquidation des commissions paritaires en multipliant les services plus ou moins réels aux syndiqués : la question n’est pas seulement que des responsables syndicaux défendent les personnels, mais aussi et surtout de rompre avec la délégation de pouvoir, que les personnels défendent eux-mêmes et elles-mêmes collectivement leurs droits… et que les personnels s’organisent à tous les niveaux, depuis la solidarité collective élémentaire (c’est le sens de notre amendement sur les caisses de grève, en accord avec l’Ecole Emancipée) jusqu’à la construction de luttes : à savoir la question de mettre en place des AG souveraines de personnels pour mener l’action revendicative, non seulement au niveau local mais aussi jusqu’au niveau national (c’est le sens de notre amendement sur la question de l’auto-organisation, lui aussi qui fait accord avec l’EE).
3) développer un syndicalisme qui cherche en permanence à unifier les personnels : c’est ainsi que nous construirons les possibilités de riposte collective. Nous voyons notamment deux éléments fondamentaux sur cette question :
– tout d’abord, unifier les personnels implique de faire de la question de la précarité une priorité (unifier les personnels implique de surmonter les divisions liées à la précarité). C’est le sens de notre amendement pour la titularisation immédiate et sans condition de tous et toutes les non-titulaires.
– ensuite, unifier les personnels est contradictoire avec la structuration actuelle de la FSU en syndicats nationaux catégoriels. Développer la conscience de classe et les intérêts communs des personnels, dépasser les divisions catégorielles, impliquent de remplacer les syndicats nationaux par des syndicats généraux regroupant toutes les catégories de personnels sur le lieu de travail. C’est ce que nous appelons la « fédération d’industrie ».
Intervention Émancipation : présentation de la motion
« En finir avec l’état d’exception, défendre les libertés démocratiques »
S’agissant des difficultés de syndicalisation, l’épidémie de covid 19 ne peut tout expliquer. On doit aussi interroger l’orientation du syndicat.
Or, depuis mars 2020, nous vivons sous un état d’exception. En déclarant « nous sommes en guerre », Macon assimilait « urgence sanitaire » et « état d’urgence ». Alors qu’il refusait depuis des mois la satisfaction des revendications des soignants, poursuivant sa politique de casse des hôpitaux public et du système de santé, Macron imposait, par la loi du 23 mars, l’« état d’urgence ».
L’attribution de pouvoirs exorbitants à l’exécutif a ainsi permis et permet encore d’accélérer la destruction des services publics et des droits des salariés.
Nombre de droits fondamentaux sont ainsi mis en cause : droit d’aller et de venir, prolongation automatique des détentions provisoires, pénalisation du non-respect des règles de confinement, recours aux drones pour assurer des missions de police, utilisation d’outils de collecte des données personnelles, liberté de prescription…
L’activité syndicale et les possibilités de résistance en sont grandement entravées.
La responsabilité de notre syndicat (de la FSU) était de combattre, dès mars 2020, les lois qui inscrivent l’État d’urgence dans de Code de la santé publique.
Et aujourd’hui, avec le projet de loi étudiée au Parlement (le 8e texte depuis 14 mois !), s’annonce une « sortie de l’état d’urgence » en trompe l’œil. Ce projet est approuvé par Les Républicains. Il permet d’étendre des dispositions contre les droits des salariés, comme le droit au repos. Il crée un précédent : le fait de devoir justifier de son état de santé pour exercer certaines libertés.
L’état d’urgence a favorisé l’adoption de nouvelles lois liberticides. Tout laisse à craindre que nombre de dispositifs seront pérennisés comme l’ont été certaines dispositions de l’état d’urgence de 2015.
Nombre de collègues, de syndiqués craignent le basculement dans une société de surveillance généralisée.
La syndicalisation, le renforcement du SNES dépendent de son orientation. Il y a urgence que notre congrès prenne clairement position contre l’état d’urgence, et combatte réellement pour l’abrogation de toutes ces lois liberticides.
Intervention Emancipation sur la précarité
Nous avons prévu une intervention autour des questions de précarité qui se traduirait par l’élaboration d’un mandat clair en terme de revendications concernant la titularisation des AED au paragraphe 23 (soutenu par Emancipation) puis concernant la titularisation sans condition de nationalité ni de concours pour les non titulaires au paragraphe 35 (soutenu par Emancipationet Ecole Emancipée).
Sur la question de la titularisation des non titulaires, on a entendu des choses dans ce congrès : revendication de l’abandon de la clause de nationalité pour l’accès au concours, mandat existant d’intégration à l’année de stage pour validation. Du côté du secrétariat on continue par contre de patiner en renvoyant à la réaffirmation d’un plan de titularisation. Le SNES pourrait prendre de l’avance en ancrant son syndicalisme dans des catégories qui représentent l’avenir de la profession pour Blanquer alors qu’elles représenteraient le passé si on arrivait à mobiliser les collègues resté.es sur la touche à cause des réformes successives du collège et du lycée, pour obtenir leur titularisation avant de conditionner ensuite l’accès à la profession exclusivement sur concours. Aussi, nous ne serons toujours pas sorti de la pandémie en septembre et la question de l’embauche massive de profs est liée à la question de la titularisation des collègues resté.es sur la touche…
Concernant les AED et la titularisation sous statut d’Educateur et éducatrice scolaire soutenue par Emancipation, les propositions de mandat d’étude déjà voté à Rennes sonnent, certain.es l’ont évoqué, comme un enterrement de première classe… il est aussi difficile de comprendre la proposition d’établir des mandats en internes avant de se tourner vers les AED… La méthode est à géométrie variable en tout cas parce qu’on on entend souvent dire que le SNES ne peut prendre telle ou telle position car les salles des profs ne suivraient pas… Quand on discute avec les AED sur les difficultés à participer aux heures d’informations syndicales, on a parfois des retours sur le sentiment de ne pas être considérée.s comme des des égaux. Aller vers la coordination nationale des AED en reprenant leur revendication statutaire d’éducateur et éducatrice sportif et en participant à leur groupe de travail serait une manière de montrer qu’il en est autrement pour les enseignant.es du syndicat majoritaire.