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Manifestations interdites, démocratie attaquée

Le 12 octobre, le Ministre de l’Intérieur a interdit toutes les manifestations de soutien au peuple palestinien. La France, avec l’Allemagne, fait ainsi partie des très rares États européens à avoir pris cette disposition. Il faut dire que Darmanin est un spécialiste, et a multiplié les interdictions de manifester, notamment celles portant sur les enjeux environnementaux. Le droit de manifester pacifiquement, soumis à l’obligation préalable de déclaration en préfecture, existe depuis le décret du 23 octobre 1935. C’est un droit démocratique fondamental, le remettre en cause c’est attaquer la démocratie.

Mercredi 18 octobre le Conseil d’État a invalidé l’interdiction systématique de toute manifestation pro palestinienne, laissant aux Préfets le pouvoir de décider au cas par cas des interdictions.

Retour sur la manifestation parisienne du 14 octobre

Le 14/10 s’est tenue Place de la République à Paris, à partir de 15h un rassemblement en soutien au peuple palestinien dans sa confrontation avec l’État d’Israël, État colonial d’apartheid.

À 15h, une centaine de personnes était rassemblée sur la place déjà circonscrite par les forces de l’ordre nombreuses, positionnées sur toutes les voies d’accès. Peu après 15h, les premiers slogans “Palestine vaincra, Palestine vivra” donnèrent le signal d’une manifestation à l’évidence symbolique, oubliée ou fort peu relayée par les organisations supposées soutenir la cause palestinienne. Mais un drapeau palestinien, déployé sur toute la façade d’un immeuble central sur le périmètre de la place, donna courage et ardeur à ce modeste rassemblement.

Très vite les manifestant·es furent nassé·es, dans l’impossibilité physique de se libérer des forces de police. La tactique de la police permettait d’entrer dans la nasse, mais pas d’en sortir, si bien qu’à 16h le rassemblement pouvait réunir jusqu’à 500 personnes.

Une fois le rassemblement évalué à son niveau le plus haut, vers 16h30, les premières saisies de manifestant·es à l’intérieur de la nasse débutèrent. Des cohortes de forces de police exfiltraient de manière indiscriminée, manu militari, les personnes présentes, lesquelles se positionnant de façon enchaînée, offraient résistance et refus d’obtempérer, ce qui provoqua échanges de coups et rixes diverses (sitting enchaîné comme opposition).

Vers 18h ce fut mon tour. Embarqué de façon peu amène par deux gendarmes, une fois exfiltré, je fus plaqué au mur et prié de laisser accès à mes poches pour “vérifications”. J’ai présenté ma carte d’identité, rien de plus. J’avais laissé mon téléphone chez moi. Mon identité est bien relevée, mon lieu d’habitation bien précisé. Le gendarme me dresse alors une contravention de 135 euros pour participation à une manifestation interdite dans un contexte “d’état d’urgence absolu Vigipirate”… si j’ai bien entendu. Plus un avertissement du genre “on ne veut plus vous revoir dans ces manifestations” à l’évidence en soutien au peuple palestinien. L’intimidation est clairement exprimée.

Il en fut ainsi jusqu’à tard dans la soirée. Le pouvoir délimite et fixe notre champ de liberté d’expression politique et sanctionne dès qu’il juge la transgression. L’État démocratique montre désormais la nature d’un État policier autoritaire de classe.

Ce rassemblement a fait la preuve d’une présence de manifestant·es venue des quartiers et des banlieues périphériques, de composantes sociales laborieuses populaires à large dominante arabe, maghrébine, dans sa diversité générationnelle et de sexe. Les femmes, voilées ou pas ont pris toute leur part dans l’expression politique de la manifestation, y compris dans la confrontation physique avec la police.

Les messages politiques toujours dignes et maîtrisés, condamnaient la nature indigne de l’État d’Israël, dans son expression sioniste, d’apartheid, et de prédations coloniales. Aucunes vociférations antisémites. La police a été dénoncée pour sa nature raciste et violente. Seuls les drapeaux palestiniens flottaient. Toutes et tous uni·es en défense de Gaza, mais sans jamais évoquer les forces du Hamas.

La détermination de cette population, populaire, anonyme, mérite tout notre humble soutien de syndicalistes, en ces circonstances tragiques que connaît le peuple palestinien et plus douloureusement encore le peuple gazaoui.

Notre bourgeoisie a très clairement pris son parti, prenons le nôtre !

Claude