Le premier jour du congrès de la FSU a débuté avec le discours du secrétaire général Benoît Teste sur la situation politique et syndicale, suivi d’un débat. Ci-dessous et en pièce jointe, l’intervention de la camarade au titre d’Emancipation dans le débat.
Bonjour camarades,
J’interviens au titre d’Emancipation et vous pouvez mieux nous connaître en vous procurant notre revue, L’Emancipation syndicale et pédagogique, sur la table de presse en face de la salle du congrès.
Ce qui s’est passé le 26 janvier éclaire à la fois les compléments au rapport d’activité développés par Benoit Teste et l’orientation de la direction de la FSU.
– La signature de l’accord sur la protection sociale complémentaire éclaire le 06 décembre 2018 ; en plein mouvement des gilets jaunes, le journal Le Monde titrait : « sous pression, Macron lance un appel à l’aide »… cet appel sera entendu, puisque quelques heures après la FSU et presque tous les syndicats publient un communiqué qui se félicite des annonces de Macron et condamne les « violences » des manifestants, sans dire un mot sur la répression d’Etat qui blesse, éborgne et mutile. Face à un mouvement surgissant en-dehors des cadres traditionnels (dont les syndicats), provoquant la plus grande crise politique depuis bien longtemps et posant de nombreuses questions sur l’auto-organisation, la démocratie, le social et l’écologie… les directions syndicales se posent ainsi en gardiennes de l’ordre social.
– La signature de l’accord sur la protection sociale complémentaire éclaire aussi le 13 juillet 2021. Au lendemain des annonces liberticides de Macron sur le pass sanitaire, la FSU avec l’ensemble des organisations syndicales de la Fonction publique signent un accord sur le télétravail avec le gouvernement. Et le 26 janvier 2022, le surlendemain de l’imposition du pass vaccinal encore plus attentatoire aux libertés, et en plein mouvement contre la politique sanitaire de Blanquer et Macron, elles récidivent avec l’accord sur la protection sociale complémentaire.
La boucle est bouclée : En plus d’être les gardiennes de l’ordre social, les directions syndicales n’apparaissent plus que comme les signataires d’accords contraires à leurs mandats, avec un gouvernement profondément contesté, combattu et sur le départ.
Ces faits parlent d’eux-mêmes. Ce ne sont pas des fautes de parcours, mais les manifestations d’une orientation, plus globale, commune non seulement au secrétariat fédéral Unité et Action / Ecole Emancipée, mais aussi à la grande majorité du syndicalisme, y compris quand il s’auto-proclame comme étant « de lutte ». Et que la direction de la fédération n’ait pas été la seule à signer doit interroger, plus que rassurer. Qu’est il advenu de ce syndicalisme différent, démocratique et combatif de la FSU ?
A Emancipation, nous considérons qu’on ne construit pas une alternative syndicale contre les agressions de pouvoirs de plus en plus réactionnaires, en se repliant sur la gestion routinière d’un appareil bureaucratisé, qui mesure l’action syndicale au nombre de voix aux élections professionnelles
Car la situation, en France et dans le monde, est particulière. De plus en plus, ce système capitaliste et ce gouvernement macronien sont rejetés. En France comme ailleurs, des luttes surviennent, pour construire un autre avenir : luttes des travailleur·es y compris précaires (comme Ibis Batignolles ou Chronodrive…), des jeunes, des retraité·es, des femmes et minorités de genre, des « gilets jaunes », des défenseur·es de l’environnement, des occupant·es des ZAD et des Jardins à défendre, des exilé·es, des antiracistes, des AED et AESH… elles montrent la volonté de prendre en main son avenir en partant de la base, et pas toujours des réseaux militants traditionnels. Elles s’accompagnent de phénomènes d’auto-organisation : AG souveraines d’établissements ou inter-établissements, coordinations ou autre comme lors des luttes contre la retraite à points, et tout récemment la mise en place d’une coordination nationale féministe à l’issue d’une réunion de plusieurs centaines de militantes.
Ce n’est qu’en s’appuyant sur ces aspirations à l’auto-organisation des luttes et à la démocratie directe que l’on peut construire les rapports de forces indispensables pour résister et gagner sur les revendications. <br>C’est la responsabilité du congrès de la FSU de débattre de perspectives revendicatives. De notre point de vue, elles doivent s’articuler autour de deux aspects :
– tout d’abord, des revendications immédiates : sur les créations massives de postes statutaires, la titularisation immédiate de tous et toutes les précaires, les augmentations uniformes des salaires, l’abrogation de l’ensemble des contre-réformes de ce gouvernement, à commencer par la loi Rilhac sur la direction d’école et la réforme du bac…
– ensuite, il faut lier ces revendications immédiates à une perspective d’ensemble : celle de la lutte des classes, de la démocratie directe et de l’émancipation de toutes les oppressions, de la marchandisation des être humains, comme de l’environnement. Autrement dit : la lutte pour en finir avec le système capitaliste.
Pour finir, je me tourne vers Benoit. Les camarades d’Emancipation se sont cotisé.es afin de faire un cadeau au secrétaire général. Le secrétariat fédéral, qu’il représente, a réussi un tour de force. En quelques mois, il a réussi à faire signer deux accords à la Fédération. Deux accords sans aucun rapport de forces, deux accords dont les personnels et les syndicats n’étaient pas demandeurs, deux accords dont les termes sont pour les moins éloignés des mandats de la FSU, bref deux accords qui profitent avant tout au gouvernement. Il convient de saluer cette performance. Et la valeur n’attendant pas le nombre des années, nous faisons à Benoit Teste le même cadeau que nous avions fait à d’autres secrétaires généraux en leur temps : un joli stylo en bois d’olivier pour apposer une signature élégante sur ces accords qu’annonce Macron ou que proposera tout régime au moins aussi réactionnaire.
Mais contrairement à ceux offerts précédemment, celui-là dispose de tous les perfectionnements technologiques : une certaine mémoire, notamment des mandats de la FSU, un système de sécurité qui le bloque en cas de signatures contraires à ces mandats. Par ailleurs il est connecté, mais pas aux ministères, ni même aux autres directions syndicales, seulement à l’ensemble des syndiqué.es.