Vous n’avez rien contre les jeunes ?
Là est la question. On n’y pense pas souvent mais le problème est de taille. Problématique même. Comment mettre une baleine dans une valise ?
En effet. Nous partons en voyage. Nous, nous ne devons pas partir en voyage. Nous voulons. Et nous savons où nous allons. Et nous savons quand nous revenons. Et nous savons que nous revenons.
Mais quand doit partir vite – nous devons nous en aller et l’heure est venue – et faire tenir une vie dans une valise, qu’y met-on ? Tout ce qui peut rentrer.
Mais Ma baleine est grande, comme toutes les baleines. Et ma valise est petite comme toutes les valises.
Alors on trie, on choisit, on abandonne et on sauve, on plie sa baleine : “Essaie d’expirer tout l’air, baleine, peut-être qu’alors…”. On y met ce qu’on peut, on entasse, on enfourne : “Ce bout par ici, ce bout par là…”, “… et on y est !”
Parce qu’à la fin, on le sait, “il faut partir”.
Guridi, d’un trait anonyme, dans lequel chacun se reconnaîtra, ou aura peur de se reconnaître, dans une actualité étouffante, utilise dans cet album les couleurs de l’exil sur un blanc crème aussi immense qu’affolant. Le texte sous l’apparence d’une blague surréaliste prend toute sa transparence avec la dédicace : “À toutes les personnes qui luttent jour après jour pour survivre dignement en fuyant l’horreur”.
Une leçon d’humilité, d’humanité.
Article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme : 1. Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un État. 2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.
François Braud, droit de l’hommiste
Papier écrit en écoutant Philippe Léotard, demi-mots amers.
- Comment mettre une baleine dans une valise ?, Gurudi, traduit par Anne Casterman, CotCotCot Éditions, 2021, 13€50.
- À commander à l’EDMP (8 impasse Crozatier, Paris 12, edmp@numericable.fr)
