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Offensive de la “catho d’Angers”…

Tandis que l’Université publique est confrontée à la pénurie de moyens, l’enseignement supérieur privé est en plein essor. L’implantation à Niort d’un nouveau site de l’université catholique d’Angers témoigne de cette prospérité et menace directement la laïcité.

L’Association Saint-Yves a été fondée en 1875 par Charles-Émile Freppel, évêque d’Angers de 1870 à 1891 et député monarchiste du Finistère de 1880 à 1891. En tant que député, il combattit l’instruction laïque, qu’il jugeait “inutile, inefficace et tendant au socialisme d’État” et s’opposa au rétablissement du divorce. Son association (reconnue d’utilité publique le 24 octobre 1941…), gère donc l’Université catholique de l’Ouest (UCO), créée elle aussi en 1875.

À noter que le titre d’université ne peut pas être utilisé par un établissement privé d’enseignement supérieur selon le Code de l’éducation (article L 731-14), mais l’usurpation n’est-elle pas le principal moteur des religions ? Jusqu’en 1971 et l’ouverture par l’État de l’Université d’Angers (UA), l’UCO se trouve donc en situation de monopole de l’enseignement supérieur dans cette ville. Une charte de non-ingérence réciproque est signée entre les deux établissements quant à l’ouverture de nouvelles filières. Cependant, même si la seconde explosion scolaire a largement bénéficié à l’UA qui accueille aujourd’hui 22 000 étudiantEs contre 12 000 pour l’UCO, cette dernière a toujours étendu son influence en ouvrant de nouvelles filières qui concurrencent directement l’UA au mépris de la charte de non-ingérence réciproque, comme par exemple la filière IFEPSA (Institut de Formation en Éducation Physique et en Sport) qui propose le même contenu que la filière STAPS (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives) de l’UA et des autres universités publiques. L’UCO a également ouvert de nouveaux sites à Guingamp, Vannes, Laval, Papeete, puis, plus récemment, à Nantes (2014), Saint-Denis de la Réunion (2016) et Niort (2020), une ouverture étant prévue au Mans en 2022. Elle profite également de Parcoursup qui dirige vers elle les étudiantEs alors qu’elle n’est pas une université, les droits d’inscription en Licence allant de 2900 à 6500 euros selon les spécialités (tous les chiffres sur l’UCO proviennent de son site uco.fr).

Quelques détails concernant sa dernière implantation à Niort. La préfecture des Deux-Sèvres était administrée par les socialistes depuis 1945 mais, en 2014, large virage à droite avec l’élection de Jérôme Baloge, du Mouvement radical (ex Parti radical), au premier tour avec 53 % des voix, réélu en 2020 avec cette fois-ci 65 % des voix, toujours au premier tour. Outre l’organisation de la dégradation du service public (baisse de 10 % des effectifs municipaux/communauté d’agglomération/ CCAS) sauf pour la police municipale (doublement des effectifs, achats de deux véhicules 4×4, de deux motos, de LBD et de deux chiens), les cadeaux au patronat (par exemple la vente à “prix d’ami” à l’UIMM de l’ancien bâtiment de la pépinière d’entreprises), la suppression de la subvention annuelle accordée aux syndicats pour régler leurs factures d’eau, de gaz et d’électricité (6300 euros), c’est bien le maire qui a proposé au recteur de l’UCO, par ailleurs évêque d’Angers, de venir installer une antenne à Niort (Ouest-France du 21/10/2019). Pour les locaux, pas de problème : la mairie rachète les bâtiments de l’ancien IUFM pour 1,2 M d’euros mais à la rentrée 2020, les travaux, payés aussi par l’argent public, ne sont pas terminés. Qu’à cela ne tienne, la mairie acquière les locaux de l’ancienne MSA (5 M d’euros + 1.8 M de travaux) afin que la rentrée puisse se faire… Ainsi, huit millions d’euros d’argent public ont été dépensés par les élus pour financer l’enseignement privé. De plus, comme l’indique un communiqué de presse commun FSU 16, 79 et 86, “cette politique de développement de l’enseignement supérieur privé, sans aucune concertation ni cohérence, fragilise le service public d’enseignement supérieur, déjà impacté par des budgets très insuffisants, et par conséquence, réduit les possibilités d’accès pour les étudiantEs d’origine modeste”.

Ainsi, l’enseignement catholique (et privé de manière générale) continue de recevoir des millions d’euros de fonds publics depuis le vote de la loi Debré en 1959 qui organise le financement public des établissements sous contrat avec l’État. Il serait temps d’y mettre fin.

François Marchesseau (GD 17)