Nous sommes entrés, à propos du puissant mouvement contre la réforme des retraites qui secoue le pays depuis plus d’un mois, dans un nouveau cycle de violences policières dont Serge, fils de l’éditeur et ami libertaire Jean-Pierre Duteuil, (éditions Acratie), grièvement blessé à la tête à Sainte-Soline et encore dans le coma début avril, vit les funestes conséquences.
Ce qu’il reste de fidèles à Macron, dont Darmanin, le ministre de l’Intérieur, relance le couplet bien connu des violences inadmissibles des manifestant·es, traité·es en bloc de terroristes ; un expert sur France Inter affirme qu’il n’y a pas à remettre en cause les agissements de la police ni son équipement de guerre mais la proportionnalité de l’usage de celui-ci !
Violence de la répression
Aggravant des pratiques interdites par la loi comme le lancer de grenades en cours de déplacement en quad 1, et un acharnement gratuit sur les manifestant·es à terre, un retard gravissime dans l’autorisation donnée au SAMU par le commandant des forces de l’ordre de parvenir sur les lieux où les deux blessés graves étaient soignés tant bien que mal par leurs compagnons, leur faisait encourir le pire. D’après les mêmes sources, le prétexte du risque à ne pas faire courir aux équipes soignantes ne peut tenir puisque selon plusieurs témoins le calme était revenu à l’heure où l’intervention médicale aurait pu se faire.
Le bilan de ces affrontements de Sainte-Soline évoque celui de la répression des Gilets jaunes2.
Cette violence que le pouvoir attribue aux formes d’un massif refus populaire sert en fait de paravent à ses propres exactions. Ces dernières s’ajoutent à une violence d’État continuelle, lisible dans les diverses mesures sociales mettant les exigences du marché et de l’Europe au centre de la politique sans tenir compte de la situation critique de celles et ceux qui y sont sacrifié·es.
Violences sociales
Violence de la réforme des retraites et de sa forme d’imposition, après celle d’une nouvelle réglementation du chômage, chiche distribution de primes et replâtrages çà et là en place d’une augmentation des salaires plus que jamais justifiée par l’inflation, et de moyens supplémentaires pour les services publics, sélection accrue des étudiant·es défavorisant un peu plus ceux et celles issu·es des classes populaires, loi anti-squat pénalisant les locataires en défaut de paiement et leur valant l’expulsion immédiate et des amendes etc., etc.
La paralysie des instances représentatives contournées et piétinées par un arsenal de recours autoritaires comme le 49,3 ne permet plus d’escompter le moindre infléchissement de cette politique vers une diminution des inégalités.
C’est cela que la jeunesse, au-delà de l’objectif d’un avenir qui ne soit pas amputé de précieuses années, dévoile aux côtés d’autres générations.
Toute forme de domination est une violence.
La violence d’État qui a tous les moyens politiques, légaux, matériels et financiers de l’exercer, est en cette période celle qu’il faut dénoncer et combattre à tout prix.
Ce qui ne signifie pas le choix existentiel préalable d’une autre violence à lui opposer, mais dans certaines circonstances urgentes la résignation à celle-ci comme à l’ultime recours.
Marie-Claire Calmus