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Retour sur La carte postale

Au sujet de Céline, j’évoquais dernièrement le roman La Carte Postale d’Anne Berest, qui relate sa quête autour de la branche maternelle de sa famille, les Rabinovitch, tout comme l’historien Ivan Jablonka le fait dans son ouvrage Histoire des grands-parents que je n’ai pas eus, ou bien Annette Wievorka, dans le récent Tombeaux. Autobiographie de ma famille.

En cette période, où les repères sont brouillés, où règnent la désinformation, la manipulation des faits, voire le négationnisme, ces ouvrages sont bien nécessaires pour les jeunes générations.

Anne Berest n’est pas historienne, comme le sont Ivan Jablonka ou Annette Wievorka, qui est spécialiste de la Shoah, mais romancière et scénariste, La Carte Postale est qualifié dans les médias de “roman vrai…, récit historique…, enquête contemporaine…, polar initiatique…”, ce faisant il est sans doute plus facile d’accès (notamment pour des adolescent·es) que le récit d’Annette Wievorka (que je n’ai pas encore lu).

Avec ce récit, A. Berest s’inscrit dans la continuité d’un premier ouvrage, co-écrit avec sa sœur Claire et qui partait à la redécouverte de sa grand-mère maternelle Myriam (titre éponyme) mariée avec Vicente Picabia, fils mal aimé du peintre et de sa compagne Gabrièle Buffet, qui ont eu une vie tourmentée, évoquée justement dans La Carte Postale.

Myriam et plus encore sa famille, ses parents, sa sœur et son frère, sont au cœur du récit.

Difficilement classable, donc, mi-fiction dans la tentative de reconstitution des moments de la vie quotidienne, mi-récit historique en ce qu’il déroule des événements ancrés dans l’Histoire : révolution Russe, antisémitisme à travers l’Europe, guerre, déportation, holocauste, résistance française…

Mais aussi quête initiatique, la narratrice s’interrogeant sur ce que peut signifier le mot “Juif” ou être “juif” dans une vie laïque.

C’est ainsi qu’à la suite de la narratrice, Anna Berest, nous suivons l’(les) itinéraire (s) des Rabinovitch, grande fratrie russe, de religion judaïque, pays que doit fuir Ephraïm, l’arrière-grand-père, après la révolution, puisqu’il est membre du parti SR pourchassé par les bolchéviques.

Cette partie de la famille, (Ephraïm, son épouse et sa première fille, Myriam) émigre en Lettonie, y fait fortune, est obligée d’en repartir en butte là aussi à l’antisémitisme, s’établit en France, émigre en Palestine, revient en France pour disparaître à Auschwitz, arrêtée et livrée aux nazis allemands, par le régime de Pétain.

Seule Myriam, échappera à l’arrestation par les gendarmes français…

Bien mené, bien documenté, d’accès facile, souvent émouvant, c’est de mon point de vue, un bon ouvrage pour une étude de cette période, d’autant qu’il existe un livret pédagogique sur le site de l’éditeur : https://medias.hachette-livre.fr/media/contenuNumerique/041/704731-001-C.pdf

Bernard Foulon

  • Histoire des grands-parents que je n’ai pas eus, Ivan Jablonka, Seuil, col La Librairie du XXIe siècle, 2012, 448 p., 24.30 €.
  • Tombeaux. Autobiographie de ma famille, Annette Wievorka, Seuil, col Fiction & Cie, 2022, 384 p., 21 €.
  • La carte postale, Anne Berest, Le livre de poche, 2022, 512 p., 8,90 €.