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À Niort, une parodie de justice

Au moins 200 personnes étaient venues, lundi 28 novembre, soutenir les cinq militants jugés au Tribunal de Niort pour “participation à un groupement en vue de commettre des violences ou dégradations de biens”, suite à la manifestation de Sainte-Soline.

Tout le monde ne pouvait pas entrer dans le tribunal. À l’extérieur, malgré la pluie, une saynète était organisée pour condamner les véritables responsables : la présidente de la FNSEA, les président et vice-président de la Coop de l’eau, le président de la Chambre d’agriculture… À l’intérieur, c’est une vraie parodie de justice qui s’est déroulée.

Une répression politique

Le collectif Bassines Non Merci, Les Soulèvements de la terre, les cinq prévenus ainsi que leurs avocat·es, dénoncent un nouveau déni de justice dans le cadre de la répression exceptionnelle visant les militant·es anti-bassine. Dans une expression commune dont on reprend ici de larges extraits, ils mettent en cause les lourdes pressions d’un gouvernement dont l’inaction climatique est devenue flagrante et qui fait face à un mouvement populaire croissant pour la défense de l’eau.

Il y a un mois cinq personnes se voyaient chargées du chef d’inculpation de “participation à un groupement en vue de commettre des violences ou dégradations de biens” pour avoir été simplement présentes à la manifestation de Sainte-Soline tout comme 8 000 autres personnes. On voit bien là qu’il s’agit d’un glissement inquiétant de la répression politique en France : juger une intention présumée plutôt qu’un acte, et cela sans qu’aucune preuve ne vienne appuyer ces allégations.

À la suite de leur garde à vue, les cinq inculpés ont refusé de comparaître immédiatement afin de préparer leur défense. Malgré cela, une date avait été fixée à peine un mois plus tard au 28 novembre.

Le refus de préparer la défense

Dans l’intérêt des inculpés faisant face à la préfecture qui prépare un dossier depuis plus d’un an comme le dévoileront les réquisitions, un report de ce procès avait été demandé cet après-midi lors de l’audience. Au vu du contexte et des faits reprochés, ce procès représentait en effet celui de tout un mouvement qui s’oppose à la privatisation de l’eau et revendique le droit de s’y opposer. Nous souhaitions voir témoigner à cette barre des hydrologues, des paysan·nes, toutes celles et ceux qui seront privé·es de cette eau qui remplit les bassines. Cette défense ne pouvait être préparée en trois semaines. Robin, un des cinq, était par ailleurs encore en arrêt suite à sa blessure et ne pouvait être présent aujourd’hui au tribunal, ainsi que l’avocate de trois des prévenus.

Malgré ces raisons plus que suffisantes la demande de renvoi a été rejetée.

Ce refus de renvoyer le procès quitte à ne pas entendre la défense et mal juger s’inscrit dans un contexte de pressions politiques où le garde des sceaux a demandé par circulaire “une réponse pénale systématique et réactive” à l’encontre des militant·.es anti-bassines.

Une justice expéditive

Refusant pour leur part une audience expéditive concernant la protection des ressources pour les décennies à venir, l’avocat, les inculpés et les militant·es présent·es ont choisi de quitter l’audience, quitte à aller en appel.

Ils ont refusé d’accorder le moindre crédit à une cour prête à juger un absent blessé et des prévenus dont tous les avocat·es n’étaient pas présent·es.

À audience expéditive, jugement expéditif, le juge a décidé de rendre sa décision dans la foulée de l’audience, en suivant les réquisitions du procureur. Les cinq prévenus ont été condamnés à deux ou trois mois avec sursis en fonction des personnes, et sont effectivement interdites de séjour dans les Deux-Sèvres pour trois ans. Il y a là de toute évidence un empressement à faire des “exemples” afin de décourager tout un chacun·e de se rendre à des manifestations, pourtant suivies à chaque fois plus massivement. Ce refus de renvoi, cette condamnation sont les signes d’un gouvernement aux abois, et d’une justice aux ordres.

La lutte continue

Après 10 jours d’interruption, le gouvernement a imposé la reprise du chantier de Sainte-Soline. La résistance doit donc encore s’intensifier.

Le 15 décembre, un rassemblement est prévu à Orléans à l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne lors de la séance plénière de son CA, où pourrait être décidé le financement public des projets de la Vienne et une rallonge pour ceux des Deux-Sèvres.

Le 5 janvier, deux personnes seront jugées à La Rochelle suite à la manifestation de Cram-Chaban, deux autres le 6 janvier à Niort, suite à celle de Mauzé. Des rassemblements de soutien sont prévus à 13h 30 devant les deux tribunaux.

Le 25 mars, une nouvelle manifestation nationale anti-bassines aura lieu dans le Poitou-Charentes. Elle aura de nouveau pour enjeu d’impacter concrètement les projets de bassines.

Raymond Jousmet