Le Grenelle des violences conjugales et ses mesures-pansements, la réforme des retraites qui accroît les inégalités… démontrent que ce gouvernement n’entend pas remettre en cause fondamentalement les rapports d’oppression sexiste : les moyens nécessaires à une prise en charge des inégalités et violences ne sont pas donnés. Et de fait, ils peuvent difficilement l’être dans un système – capitaliste et patriarcal – qui reproduit lui-même ces violences et inégalités, par la structure même de sa politique économique. De fait, les rapports de domination se multiplient pour les femmes, d’abord parce qu’elles ont en charge, tout cela à titre gratuit, le travail domestique et de reproduction sociale ; ensuite parce que sur le marché du travail, elles sont maintenues à des postes peu valorisés socialement et financièrement. Cela signifie davantage de précarité, de chômage, de violences.
Ainsi, en France, 2/3 des tâches ménagères sont effectuées par les femmes, les femmes ont un salaire inférieur aux hommes à hauteur de 20 %, 100 % des femmes ont subi du harcèlement de rue, une femme sur six subit un viol ou une tentative de viol au cours de sa vie, une femme est tuée tous les trois jours par son compagnon ou ex.
Au croisement des rapports de classe, de genre, les femmes subissent aussi le racisme de manière accrue comme le montre la répartition du travail du “care” ou comme l’a démontré la nouvelle stigmatisation d’une mère voilée récemment. Elles subissent aussi les conséquences du réchauffement climatique (elles représentent 80 % des réfugié·es climatiques) et des politiques migratoires d’austérité.
Tous ces rapports de domination transparaissent dans les mobilisations récentes (retraites, Gilets jaunes…) et les grèves des travailleur·se.s précaires (Onet, hôtels Accor (Ibis), Mariott…), qui montrent à quel point les femmes sont déterminées à crier leur colère. Au sein de ces mobilisations, les femmes se sont saisies de la grève comme seul outil contraignant pour dénoncer leurs conditions de travail ainsi que les violences qu’elles subissent. Dans le mouvement social massif qui s’est joué depuis un an, celui des Gilets jaunes, les femmes ont pris toute leur place et ont questionné les inégalités, les violences, la précarité. Nombreuses dans le mouvement, elles s’y sont organisées, ont investi les AG et ont largement participé à construire la mobilisation. Elles sont nombreuses également à combattre la réforme des retraites qui va aggraver leurs conditions de vie. Cortèges féministes, secteurs davantage représentés par des femmes en lutte… À l’international, ces questions ont pris de l’ampleur lors des mouvements très suivis les 8 mars depuis plusieurs années, en Argentine, en Espagne et ailleurs. Là encore, la grève, du travail salarié, mais aussi du travail domestique, a été perçue comme un levier nécessaire pour contraindre le système.
Pourtant, en France notamment, la dénonciation des rapports de domination et des violences qu’ils engendrent ainsi que la possibilité pour les femmes d’engager un rapport de force effectif sur ces questions par la grève sur leur lieu de travail pour agir dans la sphère économique et/ou par la grève du travail “domestique”, peinent encore à faire sens.
Sur le plan économique, il est de la responsabilité des organisations syndicales de lancer des campagnes de grève, actives et durables.
Dans un contexte marqué par une contestation féministe croissante, la multiplication des grèves de travailleuses et la montée en force des collectifs féministes, soutenons celles qui luttent et suivons leur exemple.
Nous proposons que la FSU fasse la promotion active de la grève des femmes :
– en favorisant les formations sur les questions féministes,
– en menant une campagne de sensibilisation et d’information,
– en se tournant vers les autres organisations syndicales pour impulser ensemble l’élaboration d’une plateforme revendicative de grève concernant les droits des femmes (à commencer par le retrait de la réforme de la retraite à points et les revendications au cœur de la manifestation contre les violences faites aux femmes).
Il s’agit de réunir enfin les conditions pour construire la grève des femmes à l’occasion du 8 mars prochain, afin de continuer à inscrire la grève féministe dans le mouvement social et d’impulser une mobilisation sur la durée.
Émancipation tendance intersyndicale