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La bibliothèque du Taslu

Il y a toujours eu des livres à la ZAD (de Notre-Dame-des-Landes), dans les cabanes, les fermes, les maisons, dans un bus et même sur les barricades. Ils sont une part essentielle de toute lutte comme de tout territoire habité, dont ils concourent à étendre et enrichir les imaginaires et l’intelligence.

Empli·es de cette certitude, nous étions une dizaine de personnes habitant aux quatre coins de la zone à nous être retrouvées en 2016 avec la velléité de construire une bibliothèque. Nous l’avions alors baptisée “le Taslu”. Au pied de son phare, la bibliothèque a vu le jour alors que le projet d’aéroport était encore bien d’actualité et que la ZAD était régulièrement menacée de destruction. Elle a été une des nombreuses portes d’entrée pour des personnes désireuses de venir la défendre. Nous y avons reçu d’innombrables écrivain·es et collectifs venant d’horizons différents, parmi lesquel·les Alain Damasio qui nous a fait plonger dans son univers de science-fiction, l’anthropologue Barbara Glowczewski qui nous a parlé du monde et des luttes aborigènes, Benedikte Zitouni et Isabelle Cambourakis qui nous ont fait découvrir la lutte anti-nucléaire emblématique de femmes en Angleterre à travers l’ouvrage Des femmes contre des missiles, Jérôme Baschet et Rocio Martinez qui ont exposé des oeuvres zapatistes, Sandra Alvares qui nous a fait suivre les lignes d’erre de Fernand Deligny, Eric Vuillard qui nous a évoqué son rapport à l’histoire et la langue, le scénariste des Vieux Fourneaux et des Communardes, Wilfrid Lupano qui nous a fait découvrir la façon dont s’élabore une BD, et plus récemment Mathieu et Loriane Bellahsen et leur Révolte de la psychiatrie ou le collectif Matsuda autour de l’ouvrage Abolir la police.

Une des particularités de cette bibliothèque réside dans le fait que son fonds est entièrement constitué de dons, faits par des personnes actives dans le mouvement contre le projet d’aéroport et son monde, des auteurs et autrices, des maisons d’édition… Le catalogue de la bibliothèque, très varié et recouvrant de nombreuses thématiques, continue encore aujourd’hui de s’enrichir sans cesse : territoires en batailles (Pays Basque, Larzac, Kurdistan, Chiapas, etc.), surgissements révolutionnaires (la Commune, mai 68, révolution espagnole, etc.), essais politiques plus actuels traitant de l’écologie, du féminisme, de la répression policière, histoires du monde paysan, poésie, théâtre, romans, traités pratiques de jardinage ou construction. Certaines étagères sont même dédiées à des activités qui se déploient sur le territoire, comme les rayons d’Abrakadabois, créés par le groupe qui s’occupe de la gestion forestière des espaces boisés sur la ZAD. C’est pour nous un enjeu important, dans un endroit comme la ZAD, où la pensée s’accompagne toujours du geste.

Les livres (près de 5000 ouvrages) sont empruntables lors des permanences qui se tiennent le dimanche de 15h à 19h, et où on croise aussi bien des habitant·es de la ZAD, des fidèles des villages alentours ou des personnes tout fraîchement arrivées sur la zad. Depuis peu, en plus des rencontres et événements ponctuels, des ateliers de lecture s’y tiennent tous les derniers dimanches du mois à 18h. Et en-dehors de ces créneaux, il est possible à tout moment de venir y lire sur place, à l’ombre du phare !

Des militantes de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes