Contre les guerres, les catastrophes écologiques et sanitaires et le capitalisme qui s’en nourrit
Les capitalistes avaient du mal à maintenir une croissance exponentielle de leurs profits malgré le soutien indéfectible de leurs gendarmes mondiaux, le FMI, la banque mondiale, l’OTAN… et de leurs impérialismes, avec les nombreuses guerres dites “de faible intensité”, post coloniales, religieuses, inter-ethniques ou entre potentats, permettant d’entretenir leurs complexes militaro-industriels. Mais la crise sanitaire et sociale liée à la Covid et la guerre en Ukraine dont ils portent une bonne part de la responsabilité leur ouvrent d’immenses perspectives. La pandémie a enrichi les riches et appauvri les pauvres. Elle a permis de se débarrasser des personnes et des entreprises les moins productives et de booster les lobbies pharmaceutiques, tout en aggravant la situation des services publics de la santé (hôpital, EHPAD, sécu…). Quant à la guerre “de forte intensité” en Ukraine, peu importe que ce soit une catastrophe qui complète et aggrave celles, écologiques et sanitaires, qui vont être fatales à de nombreuses espèces, à commencer par les humain.es responsables de ces catastrophes. Peu importe qu’elle favorise des capitalismes au détriment d’autres. Elle va doper globalement les profits, avec les industries d’armement, le nucléaire militaire et dans la foulée le nucléaire civil et l’oppression et l’exploitation collatérales des travailleurs·ses, des jeunes, des femmes, des exilé·es…
Cette guerre est providentielle pour Macron. Elle conforte sa réélection comme chef de guerre et d’union nationale (qualité étonnamment concédée par ses opposant·es, y compris dits de gauche), ainsi que son programme calqué sur celui du Medef d’une société fondée sur la nucléocratie, le militarisme, le contrôle social et la fin des acquis sociaux. Les annonces concernent les retraites et le chômage. Mais en plus bien sûr, comme pour le mandat échu, il faudra compter avec des attaques surprises. À commencer par celle de la protection sociale, pour laquelle tout est prêt, y compris l’aval de l’ensemble des directions syndicales vis-à-vis de la réforme de la protection sociale complémentaire (voir l’article sur la MGEN dans ce numéro page 10). Une telle signature unanime à deux mois de l’élection présidentielle, après celle de l’accord sur le télétravail, conduit à s’interroger sur le rôle que pourraient encore jouer les directions des syndicats dans notre pays pour la résistance aux attaques du capitalisme, sans même attendre de leur part qu’elles portent des alternatives à ce capitalisme.
Une urgence syndicale, la solidarité prolétarienne avec le peuple d’Ukraine
Dans notre pays, le mouvement syndical devrait être à l’initiative des mobilisations pour un cessez-le-feu immédiat en Ukraine, pour le retrait des troupes russes, pour l’accueil sans discrimination des réfugié·es, pour l’acheminement de l’aide humanitaire, y compris par des convois syndicaux…
On en est loin, parce que beaucoup de directions syndicales se perdent dans des conjectures sur la caractérisation des responsabilités du conflit, sur les impérialismes à l’œuvre, sur l’OTAN. Empêtrées dans des alliances au sein d’internationales institutionnalisées (la Confédération syndicale internationale qui prétend “changer la mondialisation”, la Confédération européenne des syndicats qui n’est qu’une courroie de transmission de la Commission européenne, et la Fédération syndicale mondiale qui se refuse à dénoncer Poutine), elles font passer l’obligation de solidarité prolétarienne internationale, avec le peuple ukrainien, avec les syndicats ukrainiens (voir l’appel des syndicalistes ukrainien·es à Zelinsky : “pour défendre le pays, on ne doit pas porter atteinte aux droits des travailleurs !”), avec la seule centrale syndicale russe qui se soit prononcée contre la guerre de Poutine et avec les syndicats biélorusses qui dénoncent l’aide de Loukachenko… Beaucoup de syndicats ont des secteurs internationaux ramenés à leur plus simple expression et sont à la remorque d’initiatives structurées par les organisations politiques (atlantistes derrière le PS et SOS racisme, ou derrière le Mouvement de la paix…). Solidaires, les CNT et Émancipation, sont, pour ce conflit comme sur d’autres champs de solidarités, en lien avec les syndicats membres du Réseau syndical international de solidarité et de luttes.
La FSU, la CGT et Solidaires ont décidé d’organiser si possible en intersyndicale large, un convoi syndical. Mais, ces modalités étant encore floues (au moment où est écrit cet article), Émancipation a soutenu dans l’urgence des initiatives concrétisables rapidement (convoi syndical de Brest, acheminement de matériel médical par l’association Medina…).
Pas de paix sans se confronter au capitalisme partout, à commencer par la France
Dans leurs réponses les directions syndicales font l’impasse sur l’incontournable transformation sociale visant la fin du capitalisme, sans laquelle il ne saurait y avoir de paix durable. Que ce capitalisme soit celui de multinationales et de fonds financiers qui se considèrent au dessus des lois et des impôts d’États ou celui de castes d’oligarques ou de membres de partis qui ne survivent que grâce au contrôle social généralisé et à la privation généralisée des libertés fondamentales. La lutte syndicale doit être au premier plan de la défense de cette perspective de sortie du capitalisme et de renversement des régimes autoritaires qui s’accaparent les richesses, et elle doit en hâter la survenue par une orientation qui prépare les travailleurs et travailleuses à une telle confrontation.
Elles omettent de faire converger les luttes pour le peuple ukrainien avec les mobilisations contre toutes les autres guerres en cours, le nationalisme, le militarisme, les ventes d’armes et les exactions des complexes militaro-industriels qui en sont le lot ; celles en Syrie et en Lybie où l’impérialisme russe a pris la place de ceux des États- Unis et d’alliés européens sous couvert de l’Otan, celles objectivement soutenues par les mêmes au Yémen et en Palestine, ou celles néocoloniales et de pillage des ressources menées en Afrique par l’impérialisme français.
La guerre en Ukraine fait passer au second plan les luttes contre les autres menaces pour la vie sur terre, les catastrophes climatiques, l’extractivisme, les famines et bien sûr les épidémies et particulièrement la pandémie de Covid et l’utilisation qui en est faite par les capitalistes et les États à leur service.
Mais aussi les mobilisations contre l’augmentation subite et importante du coût de la vie, contre l’austérité, pour les salaires, la protection sociale, pour les conditions de travail, d’emploi. Et aussi la campagne présidentielle et les programmes qui annoncent la poursuite et l’aggravation des politiques antisociales dictées par le patronat.
Le mouvement syndical doit se préparer à combattre après les élections une situation encore plus défavorable au camp des travailleurs·ses. Les mobilisations en défense des retraites et des services publics, particulièrement de l’éducation, un temps suspendues en raison de l’épidémie de Covid, vont devoir reprendre rapidement. On peut s’interroger sur les capacités de résistance du mouvement syndical sur ces questions qui sont le cœur de métier du syndicalisme.
Certaines réponses peuvent être fournies à la faveur des débats des nombreux congrès syndicaux qui se sont tenus ou vont se tenir rapidement (Solidaires, FSU, SNES, SNUIPP, FO, CFDT, Fédérations de la CGT…).
Les 13, 26 et 27 janvier révélateurs de l’état des syndicats
Mais on peut déjà avoir une vision assez précise de l’état des syndicats en revenant sur les luttes et les choix des directions syndicales dans la période qui a précédé l’invasion de l’Ukraine.
Le 13 janvier, dans l’éducation, le niveau de la colère a été tel, notamment sur les incohérences sanitaires de Blanquer, qu’il aura suffi que les remontées des écoles contraignent le SNUIPP à appeler à la grève, rejoint par le reste de l’intersyndicale, les syndicats lycéens et la FCPE, pour allumer la mèche d’une des plus importantes grèves de ces dernières années. On a là la preuve que dans certains secteurs et dans un contexte de montée des mécontentements, un appel syndical, surtout quand il devient unitaire, peut susciter une forte mobilisation. Dans de telles conditions, la grève peut être organisée dans l’urgence, sans remettre l’appel syndical aux calendes grecques “pour se donner le temps de mobiliser”.
Mais, c’est la suite qui interroge sur la capacité/le désir des directions syndicales d’amplifier dans le temps et au niveau de l’aspect interprofessionnel cette mobilisation. Elles se sont bien gardées de proposer la reconduction aux AG. Elles ont allées négocier sans représentant·es des AG, sans même avoir cherché à consulter ces AG sur les suites à donner (en plus, au ministère, CFDT, UNSA et FSU ont laissé derrière les représentant·es lycéen·nes empêché.es de participer à la délégation et la FCPE, la CGT, FO, Solidaires qui refusaient de monter sans les lycéen·nes). Elles ont communiqué sur une satisfaction, au moins partielle, des revendications sanitaires. FSU, CGT et Solidaires ont détourné une mobilisation qui aurait pu aller beaucoup plus loin sur les revendications de fond concernant l’École, vers un de leurs appels bien antérieur et sur un tout autre sujet : une journée d’action salariale le 27 janvier. Certes, ce 27 qui sans la dynamique éducation n’aurait été qu’une pâle journée d’action a permis, de mettre en évidence les fortes attentes sur le plan des salaires et du refus de l’augmentation du coût de la vie, particulièrement des carburants, de l’électricité et du gaz… Ces attentes ont contribué à renforcer les mobilisations d’opposition au “pass vaccinal”, encore plus liberticide et inopérant au niveau de la protection contre l’épidémie que le pass sanitaire. Sur le modèle du blocage de la capitale canadienne, ces dernières ont tenté de bloquer Paris puis Bruxelles. Mais là encore, les directions syndicales ont refusé de faire le lien avec une éventuelle extension du 27.
L’appel intersyndical au 13, et celui au 27 n’ont pas permis de développer une mobilisation décisive, ni sur l’éducation, ni sur les salaires. Et ce, qu’elles soient présentées comme des journées d’action liées ou non. Elles étaient pourtant chacune en phase avec certaines attentes des personnels, mais, ce qui a manqué, comme à chaque fois, c’est une prise en compte syndicale de l’auto-organisation
La mobilisation éducation et les Marches pour la liberté, deux mouvements avec une composante forte d’auto-organisation, l’un à partir des AG professionnelles aux niveaux locaux, départementaux et parfois régionaux, l’autre à partir des réseaux sociaux et en fonction des endroits de différents courants politiques, pas tous fréquentables, ont reçu des réponses inadaptées des directions syndicales, qu’il s’agisse du dévoiement/ chevauchement empêchant l’extension de la mobilisation ou pire encore de l’indifférence/hostilité, empêchant un engagement plus large des syndicalistes, laissant le champ libre dans plusieurs régions à l’extrême droite et aux complotistes et facilitant la répression gouvernementale.
Un syndicalisme unifié dans son intégration de plus en plus décomplexée à l’appareil État
J’illustrerai à partir de la FSU que je connais mieux, une évolution qui concerne l’ensemble du syndicalisme dans la période. D’abord parce que la FSU a occupé une position clé dans la canalisation de la mobilisation éducation du 13 vers le 27. Mais aussi, parce qu’elle est devenue l’incarnation de la perméabilité entre le syndicalisme de luttes et celui de cogestion. Notamment parce qu’elle a tenu une fois de plus à marquer sa “spécificité” d’être la charnière entre les syndicats dits réformistes et ceux dits de lutte (nous allons voir que ces intitulés “réformiste” et “de lutte” ne recouvrent plus vraiment une quelconque réalité sauf peut-être en décalant les catégories “de lutte” devenant “réformiste” et “réformiste” devenant “de collaboration de classe”), avec une initiative inédite et surprenante : elle a été signataire de deux communiqués contradictoires sur le bilan du 13, celui avec la CGT, Solidaires et FO et celui avec la CFDT et l’UNSA, qui considérant que les revendications éducation étant satisfaites, il fallait passer à d’autres champs revendicatifs, avec des actions “pouvant aller jusqu’à la grève”. Et enfin le Congrès national que la FSU a tenu du 31 janvier au 4 février a eu à traiter de deux points forts et très liés : les échanges avec Martinez de la CGT et avec les deux porte-parole de Solidaires en vue de créer un nouvel outil syndical commun et aussi bien sûr, la signature unanime de l’accord sur la protection sociale complémentaire.
Pour la direction Unité et Action/École Émancipée de la FSU, un grand moment du congrès national de la FSU était censé être les engagements d’unité des responsables nationaux de la CGT et de Solidaires avec celui de la FSU. Outre le fait qu’une banderole prônant l’unité en défense de la Sécu, brandie par les délégué·es d’Émancipation a un peu gâché la fête, Martinez et les deux porte-parole national·es de Solidaires ne se sont engagé.es à rien en terme d’unification syndicale.
Il faut dire que l’unité est déjà très difficile, avec la FSU qui veut à tout prix maintenir les syndicats de cogestion dans les intersyndicales, avec FO aussi imprévisible que manipulatrice, avec la CGT qui décide de dates de grèves sans concertation avec les autres syndicats sommés de se rallier et dont les syndicats départementaux ont d’autant plus de mal à se montrer unitaires avec les autres syndicats, qu’entre eux c’est souvent déjà difficile.
En fait, ce que les syndicats ont de plus unitaire, c’est l’investissement sans exception dans le dialogue social, cache-sexe de la reconnaissance du système capitaliste comme indépassable.
La sidérante signature unanime, le 26 janvier, de l’accord interministériel sur la protection sociale complémentaire (PSC) dans la Fonction publique (FP), après celle de l’accord sur le télétravail (et en toute probabilité avant celle de l’accord de méthode sur la prévoyance), constitue une étape décisive dans l’intégration à l’appareil d’État de l’ensemble des syndicats “représentatifs”. Seules la CNT et la CNT SO se tiennent à l’écart du dialogue social et de ces accords/chevaux de Troie. Une telle unanimité n’a été possible que parce que les conditions d’information sur un sujet ardu comme la PSC, pour une prise de décision démocratique ont été bousculées, sous couvert des délais imposés par le pouvoir. Mais si près de l’élection présidentielle, elle ne peut signifier plus clairement que les directions syndicales ne croient absolument pas à l’alternative progressiste qu’elles prétendent appeler de leurs vœux, qu’elles choisissent leur candidat, Macron, et qu’elles contresignent ses projets de main-mise sur la PSC et derrière sur la sécu.
Une telle évolution des directions syndicales est l’aboutissement d’un processus entamé depuis longtemps. La reconnaissance de “représentativité” de ces syndicats résulte de la signature le 2 juin 2008 par la majorité des directions de ces mêmes syndicats du relevé de conclusions, proposé par Woerth, ministre de Sarkozy, relatif à la “rénovation du dialogue social dans la Fonction publique”, plus connu sous le nom d’accords de Bercy. Accords dont la logique allait être transposée pour le privé dans “la position commune sur la représentativité”, concoctée par la CGT et la CFDT avec les syndicats patronaux, puis dans la loi du 20 août 2008.
En fait de rénovation du dialogue social, ces accords portaient en germe l’évolution de ce rapport de force si défavorable pour le syndicalisme pendant la dernière décennie. Pour ce qui est de l’offensive des pouvoirs au service du capitalisme, elle est annoncée dans le communiqué du ministre Woerth le jour de la signature des accords de Bercy : “Premier accord négocié sur le dialogue social et son organisation au sein de la Fonction publique depuis sa fondation en 1946, les accords de Bercy marquent une rupture par rapport à la situation antérieure”. Depuis la guerre, CGT, CFDT, FO, CGC, CFTC jouissaient d’une “présomption irréfragable de représentativité” au niveau national interprofessionnel. En clair, ces cinq confédérations n’avaient à justifier ni de leur représentativité, ni de leur nombre d’adhérent·es, ni de leurs finances, pour pouvoir, à différents niveaux, présenter des délégué·es, disposer de temps de délégation ou, dans la FP, de décharges de service, signer des accords et recevoir des subventions pour la formation. Les libéraux ont exploité le fait que ce système ne tenait pas compte des évolutions du syndicalisme : autonomie de la FEN depuis la scission CGT/FO en 1947/48, perte d’influence de la CFTC suite à la scission/déconfessionnalisation de la CFDT en 1964, apparition des deux reliquats de la scission de la FEN en 1992, la FSU et l’UNSA et transformation du “Groupe des 10“ en union syndicale Solidaires en 1998.
Sous couvert d’apporter des réponses démocratiques à ces situations, les gouvernements de droite, mais aussi de gauche, ont utilisé la représentativité, instrument théorique de mesure de la force des syndicats, pour mettre en place les conditions progressives de leur asservissement. Et cette évolution est particulièrement nette dans la FP où l’État est à la fois patron et arbitre des dispositions légales et réglementaires et où le syndicalisme apparaît pour le capitalisme comme un bastion de résistance à abattre. Les accords de Bercy achèvent donc de faire voler en éclat ce qui restait d’indépendance syndicale. D’abord par rapport au contrôle gouvernemental, avec notamment l’obligation de la publication des comptes financiers. Ensuite par la forte dépendance des moyens octroyés par l’État à un syndicalisme numériquement parmi les plus faibles dans le monde et en perte d’adhérent·es.
Il s’en est suivi une concurrence sauvage entre directions syndicales, les yeux rivés sur les élections professionnelles pour grappiller à tout prix des parts de marché des subventions et décharges conditionnées par les résultats électoraux, au point qu’elles n’ont même pas vu les contreparties piégeantes. Pourtant, dans ce même communiqué cité ci-dessus, Woerth ajoute, de façon très étonnante à l’époque, “qu’il n’entend pas renoncer à sa proposition sur les actuelles commissions administratives paritaires”. En fait, il annonce déjà une des contreparties des ces accords pour le système économique de domination, dont il est professionnellement le digne représentant. Tout comme le banquier Macron, qui finira le travail 15 ans plus tard en retirant l’essentiel des prérogatives des commissions paritaires. Gageons que l’étape d’après, sera de transformer les décharges syndicales de service en argent, plus facilement modulable, forçant les syndicats à embaucher des employé·es à la place des militant·es déchargé·es et coupant ainsi encore plus le syndicat du monde du travail qu’il est censé défendre. Cette “évolution” était proposée par Woerth en 2008 (et c’est peut-être lui qui l’imposera enfin, en cas de réélection de Macron, puisqu’il vient de le rejoindre pour se dépêtrer de ses procès pour malversations sous Sarkozy).
L’auto-organisation antidote au dialogue social
Il semble donc qu’il n’y ait pas grand-chose à attendre du mouvement syndical dans une telle situation. Pour autant, il ne faut pas se lasser de syndiquer sur la base d’une orientation de lutte pour exiger des syndicats des appels le plus unitaires possibles à mobilisation. Mais il importe avant tout de renforcer l’auto-organisation, en recherchant des alliances pour contribuer au développement des luttes. Ce qui est assez simple dans les syndicats disposant de tendances constituées, dont les orientations sont connues.
Le congrès national de la FSU, comme beaucoup de congrès départementaux ont permis de constater que l’École Émancipée achève son intégration à l’appareil U&A. Les délégué·es ÉÉ, à de très rares exceptions près, ne votent plus les amendements ou motions portant sur des revendications, qui faisaient partie jusqu’ici du corpus hérité de la grande École Émancipée et que l’ÉÉ actuelle incluait sans y croire plus que cela dans ses textes d’orientation. Il en est ainsi de la titularisation immédiate sans conditions de concours ni de nationalité, de l’enseignement polytechnique, de la fédération d’industrie… Et comme iels n’ont présenté pratiquement aucun amendement ni motion, iels votent des textes qui en fait sont essentiellement des écritures U&A modifiées à la marge. L’orientation de la plupart des ÉÉ en à peine une dizaine d’année est devenue pratiquement identique à celle d’U&A, qui s’est elle-même dégradée dans la même période. On mesure l’ampleur du recentrage de l’ÉÉ depuis la scission de la grande ÉÉ qui devait donner Émancipation et l’ÉÉ maintenue. Pire même, pour des contre-parties bien maigres, comme un poste de suppléant·e de plus au secrétariat national, les ÉÉ sont prêt·es à tout pour faire passer les positions U&A, comme la signature de l’accord sur la PSC, ou pour faire disparaître les autres tendances à coup d’élévation des quotas de candidatures pour présenter des listes ou d’attribution d’un temps moins important de réponse sur l’activité et l’orientation en début de congrès, comme tenté pour ce congrès national.
Avec l’École Émancipée qui se fond dans U&A, les trois autres tendances, bien que trop minoritaires pour espérer pouvoir bloquer les décisions contestables représentent, seules, l’opposition dans la FSU. Certes URIS et FU, ne sont pas plus porteuses de positions d’organisations politiques que d’une vision globale de ce que peut-être une alternative syndicale, comme celle défendue par Émancipation. Et la plupart des militant·es de ces deux tendances ne sont pas convaincu·es de l’urgence de l’auto-organisation. Cela a tout de même eu un sens fort de voir les trois tendances minoritaires défendre la motion unitaire sur le retrait de la signature de la FSU de l’accord sur la PSC, devant les représentant·es nationaux·ales de la CGT et de Solidaires qui n’étaient disponibles que le jour de ce débat.
Mais dans les syndicats ne disposant pas de droit de tendance et en dehors du mouvement syndical, les allié·es pour contribuer au développement, à l’auto-organisation de luttes démocratiquement contrôlées par les AG et les coordinations (ouvertes aux syndicats) sont à chercher dans les syndicats oppositionnels, des sections de bases ou des collectifs de lutte.
Olivier Vinay, le 27 mars 2022