Émancipation


tendance intersyndicale

L’éducation face à l’extrême droite : pour une « résistance éducative »

Dans diverses parties du monde, nous voyons des forces d’extrême droite arriver au pouvoir ou être aux portes du pouvoir. Ces forces peuvent et doivent être considérées comme anti-démocratiques, car elles portent des programmes et des politiques ouvertement discriminatoires qui s’en prennent aux minorités, qu’elles soient immigrées, sexuelles, de genre ou encore religieuses. Elles remettent en question les droits des femmes.

Contrairement à ce qu’elles affirment, leurs politiques ne sont pas non plus favorables aux travailleurs et travailleuses des classes populaires et des classes moyennes, comme en témoignent les positions prises par des élu·es à différentes occasions, contre des mesures d’augmentation des salaires ou de justice sociale, de redistribution des richesses et de solidarité. De plus, partout où elles arrivent au pouvoir ces forces attaquent les services publics fondamentaux et réduisent leurs budgets, notamment ceux, déjà maigres, de l’éducation publique, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique.

Contrairement encore à ce qu’elles prétendent, ces forces s’en prennent également aux droits et libertés fondamentales et pratiquent lorsqu’elles sont au pouvoir une “chasse aux sorcières” politique et idéologique rappelant les épisodes les plus sombres des régimes occidentaux. Ces forces enfin remettent en cause de manière évidente et explicite la nécessité de prendre en charge l’urgence de la crise écologique.

En tant que professionnels et professionnelles de l’éducation – enseignant·es, éducateur·ices, chercheurs·ses, formateur·ices, animateur·ices, médiateur·ices, professionnel·les de l’enfance, de l’adolescence, de la jeunesse ou de l’éducation des adultes, quel que soit notre secteur, non seulement nous ne pouvons pas rester insensibles mais nous avons en plus une responsabilité particulière face à cette situation.

En effet l’extrême droite, au niveau international, considère que pour parvenir au pouvoir, il faut d’abord gagner la bataille des idées. C’est ce qu’elle est en passe de faire, à une vitesse de plus en plus rapide. Elle met en œuvre cet objectif partout, sur Internet et les réseaux sociaux, dans les médias traditionnels ou en prenant le pouvoir sur de grands médias – presse, télévision, édition – avec l’appui de milliardaires acquis à sa cause idéologique. Elle mène ainsi une forme de pédagogie publique destinée à établir l’hégémonie de ses idées. 

De plus, elle ne se contente pas de matraquer partout où elle le peut ses idées, mais elle sape méthodiquement et de manière tout à fait consciente les fondements mêmes d’une discussion basée sur la raison dans l’espace public, en retournant de manière totalement « orwellienne » le sens des mots, des idées et des actes : attaquer l’indépendance de la justice et l’égalité devant la loi reviendrait à défendre la démocratie, attaquer les médias publics pour l’intérêt de lobbys milliardaires reviendrait à défendre l’indépendance de l’information, attaquer les contre-pouvoirs démocratiques et les organisations collectives reviendrait à défendre la démocratie et la liberté d’expression, etc. Sans parler de sa stratégie assumée d’outrance verbale permanente et omniprésente, ouvertement mensongère, xénophobe et discriminatoire, mais qui serait empêchée, censurée et finalement victime.  

Or, nous, les travailleurs et travailleuses de l’éducation, nous avons une responsabilité toute particulière pour réaffirmer les valeurs démocratiques, la lutte contre les discriminations et les valeurs d’égalité, de liberté, de justice sociale et de dignité de tous et toutes. Nous avons un rôle à jouer pour lutter contre les fausses informations et les atteintes aux sciences. Nous avons un rôle à jouer pour défendre les conditions même d’un débat public libre et démocratique.  

Après les horreurs de la Seconde Guerre Mondiale et les ravages du fascisme arrivé démocratiquement au pouvoir en Allemagne, de nombreux éducateur·ices, politiques, intellectuel·les retinrent de ce traumatisme qu’il ne suffit pas de décréter la démocratie pour la garantir : il faut éduquer à la citoyenneté, éduquer à la démocratie, éduquer à l’esprit critique, pour lutter efficacement et durablement contre ses ennemis. L’urgence de la menace nous remet aujourd’hui face aux mêmes responsabilités.

C’est pourquoi, nous voulons réaffirmer notre attachement aux valeurs de l’éducation démocratique et aux principes de connaissance scientifique. C’est pourquoi, également, nous appelons tous les secteurs de l’éducation à s’engager dans une résistance éducative pour faire prévaloir ces valeurs contre les forces obscurantistes qui s’attaquent aux principes fondamentaux de la démocratie et de la connaissance scientifique. 

Pour cela, nous appelons chacune et chacun à se rapprocher d’associations professionnelles, de collectifs et de syndicats susceptibles d’organiser cette résistance collectivement.

Par le Collectif des chercheur.ses de sciences de l’éducation et de la formation en résistance *

Premières signatures des collectifs et des associations de l’éducation :

Aggiornamiento Histoire-Géo.

Coordination Antifasciste pour l’Affirmation des Libertés Académiques et Pédagogique

Emancipation – tendance intersyndicale

Fédération des Centres Sociaux de Côte d’Or

Groupe de recherche pour la démocratisation scolaire (GRDS)

Institut Coopératif de l’Ecole Moderne – ICEM Freinet.

La Ligue de l’Enseignement – Fédération de Côte d’Or

La Maison-phare – Association d’éducation Populaire

Le Cri de la plume – Maison de la philosophie (Dijon)

Le fil – association de médiation culturelle

Le Mouvement de la Paix

Les Orageuses – association d’éducation populaire féministe.

La rage du Social – Maison d’édition et institut de pédagogie sociale

Les cahiers de pédagogies radicales – Pédagogies critiques dans la continuité de Paulo Freire.

MJC de la Loire – Association départementale

MJC de Bourgogne Franche Comté – Fédération régionale

Planning Familial 21

Queer Education

Quelle résistance pour l’éducation

Questions de Classes

Ressources alternatives

Séminaire de recherche militante, libertaire et pragmatiste ETAPE

Sud Education – Université Jean Monnet (Saint Etienne)

Union Départementale de la Confédération Syndicale des Familles 21


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