Au collège René Descartes, nous nous opposons à ce qu’un·e ancien·ne travailleur·euse de la BAC ou un·e policier·ère ait un droit d’entrée pour parler de consentement, de racisme ou encore de harcèlement avec les élèves. Le rôle de la police n’est pas celui des enseignant·e·s. La police réprime, les enseignant·e·s émancipent. Quelles que soient les qualités individuelles des travailleur·euse·s de la police ou de l’éducation, leurs objectifs ne sont pas les mêmes.
Cette année, la direction a mis en place avec tous les 3èmes et tous les 4èmes une heure de prévention avec une ancienne travailleuse de la BAC pour parler de consentement. Cette heure qui se fait sur le temps des cours n’a pas fait l’objet de concertation avec les équipes éducatives comme le recommande la note Eduscol relative aux intervenant·e·s extérieur·e·s en milieu scolaire. Elle n’a été ni discutée ni votée dans l’instance où se dessine l’organisation de l’établissement : le Conseil d’Administration.
Or, prenant sur le temps d’enseignement, ce temps aurait dû avoir l’accord du Conseil d’Administration et des parents, des élèves et des enseignant·e·s qui y siègent. Un partenariat, même avec un autre service public, qui prend sur le temps de cours doit être décidé en CA, même s’il est ponctuel dans le cas où il aurait une incidence sur la vie scolaire ou l’image de l’établissement (article 421 -9 du code de l’éducation).
Le fonctionnement démocratique minimal d’un établissement scolaire n’a pas été respecté.
Pour nous, ce geste de la part de la ville du Blanc-Mesnil et de la direction est une mauvaise interprétation de ce que doit être l’EVARS (Éducation à la Vie affective, Relationnelle et à la Sexualité) ou l’égalité filles-garçons dans les écoles. L’intervention s’est faite en désaccord et au mépris du cadre nécessaire à l’EVARS, cadre soutenu par notre ministère et posé en Formation d’initiative locale (FIL) au sein même de l’établissement. Elle n’a pas permis d’aborder les thématiques de l’EVARS dans la sérénité et le respect des émotions et de la dignité des élèves. Nous dénonçons à ce titre les menaces, la pression émotionnelle et la méthode du choc qui ont été utilisées lors de l’intervention et qui sont complètement incompatibles avec les objectifs et les conditions d’application d’une Éducation à la vie affective, relationnelle et à la sexualité.
Au contraire des objectifs de prévention, d’émancipation, de réduction des inégalités, de déconstruction des stéréotypes de genre et de construction d’un esprit critique, cette intervention s’inscrit dans la mission de la police de réprimer les délits, sans enseigner ni instruire. Une telle approche participe à la judiciarisation des rapports sociaux où la logique sécuritaire prime sur la logique éducative.
Les élèves savent les violences multiples commises par l’institution policière (racisme, absence de consentement dans le cadre des contrôles au faciès, meurtres, viols, agressions etc.) et le droit dérogatoire dont elle bénéficie.
La police a pour rôle de discipliner les banlieues et le message que nous envoyons aux élèves avec l’entrée de la police pour leur faire cours ou faire des ateliers est
négatif. Avec ça, ce n’est pas de la confiance que nous construisons avec eux mais bien de la défiance. Des centres de santé ferment au Blanc-Mesnil, empêchant toute possibilité d’accompagnement ou de prévention en cas de violence sexuelle ou de désorientation affective mais on envoie la police aborder le consentement… Quel message leur envoie-t-on ? « À vous, délinquant·e·s potentiel·le·s, la police pour parler de consentement » ? Non, ce n’est pas le message que nous voulons leur transmettre.
Nous demandons l’application de l’EVARS et à ce que la prévention et l’éducation dans le cadre de l’EVARS ou de l’égalité filles-garçons soit faite par la communauté éducative et des associations agréées et choisies par les membres de l’équipe éducative du collège Descartes.
L’agrément de ces associations ainsi que la mise en accord entre elles et l’équipe éducative ira dans le sens de ce que visent ces dispositifs : accompagner les élèves dans l’appréhension de notions leur permettant de prendre conscience des inégalités de genre, la construction d’un vivre ensemble qui dépasse et ne se limite pas au légalisme répressif. Nous demandons aussi à ce qu’une IMP (Indemnité de Mission Particulière) soit mise en place dans notre établissement pour permettre l’application de l’EVARS. Nous demandons aussi à ce que l’ensemble de l’équipe éducative soit formée sur son temps de travail à ces enjeux.
Nous insistons : les établissements scolaires sont des espaces d’émancipation et d’éducation. Y faire entrer la police pour ces deux missions, c’est faillir à la confiance que nous voulons établir avec les élèves et c’est faillir à l’émancipation.