Émancipation


tendance intersyndicale

Conseil national de la FSU : face au budget d’austérité, comment lutter pour défendre l’école publique ?

Le Conseil national de la FSU se tenait les 15 et 16 octobre 2024, il s’agissait du dernier Conseil national avant les congrès départementaux et le congrès national de la FSU (février 2024). Sa fonction était notamment d’adopter les rapports préparatoires au congrès national.

Mais bien entendu, on ne peut dans ces cas-là faire abstraction du contexte général, notamment celui que l’on connaît : la préparation d’une série d’attaques contre les travailleur.es et la jeunesse, la préparation d’un budget qui porterait des coups importants contre l’école publique. 4000 postes d’enseignant.es en moins (sans compter un recrutement d’AESH, mais sans toucher à leur précarité, à leur salaire indécent et à leurs mauvaises conditions de travail) ! L’éducation est frontalement attaquée, alors que l’Armée et la police continuent de voir leurs moyens augmenter : le caractère politique réactionnaire, répressif et militariste de ce gouvernement est clair !

Face à cette nécessité de mobilisation unitaire, l’intervention liminaire du secrétaire général augurait mal de la suite : reconnaissant la gravité de la situation, elle n’envisageait pas de réel plan de mobilisation. D’ailleurs, le texte « action » de la direction de la direction Unité & Action / Ecole Emancipée de la FSU voté à la fin du Conseil national, n’envisage concrètement qu’une interpellation des députés, et une campagne d’information… même une simple journée de grève semble difficilement concevable pour la direction de la FSU, alors que dans le même temps elle considère que l’attaque gouvernementale est d’une gravité très importante : « Dès aujourd’hui, la FSU appelle les personnels, les parlementaires et plus largement les parents d’élèves, à faire front pour un tout autre projet pour l’école publique. Elle fera campagne pour construire les mobilisations nécessaires. Une alerte sociale a été déposée par la FSU et toute l’Intersyndicale de l’Éducation. Une intersyndicale éducation à l’initiative de la FSU est réunie ce 16 octobre pour construire une riposte unitaire. La FSU proposera lors de cette intersyndicale une interpellation des parlementaires (hors RN) sur les enjeux du budget de l’Éducation, ainsi qu’une campagne d’information des professions dans le but de construire un plan de mobilisation des personnels incluant la grève ». En d’autres termes, la direction de la FSU n’envisage aucune action claire face à un budget très clairement austéritaire.

La tendance Émancipation (voir ses interventions ci-dessous) a centré ses interventions sur la nécessité d’un plan de lutte national qui se construit à partir de la base, par le biais de l’auto-organisation (AG souveraines des personnels). Il ne serait pas acceptable que les organisations syndicales restent l’arme au pied, et se contentent de suppliques envers les député.es.

– la situation en Palestine et au Liban : dès le début du conseil national, il y a eu plusieurs interventions (de militant.es de différentes tendances) sur cette question. Émancipation est intervenue sur la nécessité de caractériser le caractère génocidaire de l’action de l’État d’Israël qui est un enjeu en soi (la direction de la FSU s’y refuse, au nom d’un « compromis » compromis sur le fait de ne pas utiliser le terme de génocide, mais en disant qu’on peut utiliser le terme « épuration ethnique »). Émancipation est aussi intervenue sur les nécessaires sanctions envers Israël, en particulier la rupture des relations universitaires, la signature de la FSU à la pétition contre la présence d’entreprises israéliennes au salon Euronaval, la nécessité de revendiquer le retrait de la circulaire Hetzel dans l’enseignement supérieur qui cherche à criminaliser le débat politique dans les universités.

On peut relever aussi deux débats saillants de ce CDFN :

– un certain malaise s’installe sur l’application de l’accord sur la protection sociale complémentaire (PSC) : pour rappel, en 2020 l’ensemble des organisations syndicales de la Fonction publique ont signé un accord avec le gouvernement en 2020 sur la Protection sociale complémentaire des fonctionnaires. Aujourd’hui, on commence à en voir les dégâts dans les ministères. Ainsi pour le ministère de la Transition écologique (60 000 agent.es), le groupe Alan, le groupe Alan1, start-up chouchoute de Sarkozy et Macron et soutenue par des fonds étrangers, avait raflé le marché de la PSC pour le ministère de la transition écologique (voir l’article de Mediapart sur le sujet). Pour le ministère de l’agriculture, c’est MERCER, un fond de pension qui a récupéré le marché. Émancipation avait combattu la signature de cet accord, la direction de la FSU avait parlé de « signature de combat »… on a vu la signature et ses effets, on n’a jamais vu le « combat ». La direction de la FSU a répondu en étant assez gênée : ils ont dit qu’il fallait dénoncer la mainmise des fonds de pension sur la fonction publique, et qu’ils avaient été « obligés » de signer l’accord.

Cette question s’intègre dans une offensive plus vaste du gouvernement. Avec les mesures incluses dans le PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité) 2025, on peut notre que par exemple la part de l’Assurance maladie dans le remboursement des consultations chez le médecin et les sages-femmes par la Sécu irait en diminuant (augmentation du ticket modérateur de 30 à 40 % = plus d’un milliard d’euros d’économies). Et en « même temps » aura lieu une hausse proportionnelle de la part des complémentaires santé.

On voit plus clairement ce qui se met en place : l’accord sur la PSC signé par toutes les organisations syndicales, favorise le processus de « vases communicants »; il permet à l’Etat de diminuer les remboursements par la Sécu et en même temps à la part mutuelle d’augmenter (avec pour ceux et celles qui pourront payer, l’incitation à prendre une sur complémentaire).

Dans ces conditions, la réaffirmation démonstrative du mandat de la FSU « 100% sécu », est illusoire si en même temps la FSU signe des accords qui facilitent le processus de liquidation de la Sécu.

Cette marchandisation de la protection sociale complémentaire va-t-elle s’étendre à d’autres ministères, comme celui de l’Éducation nationale ?

Vous pouvez prendre connaissance ci-dessous des interventions de la tendance Emancipation, et des textes soumis au vote.

Intervention Émancipation dans le débat général

Le gouvernement a dévoilé la semaine dernière les projets de budgets : Projet de loi de finances (PLF) et projet de loi de fiance de la Sécurité sociale (PLFSS). Sans surprise, il s’agit pour lui de faire payer aux salariés les largesses accordées aux possédants (exemptions d’impôts, exonérations de cotisations, subventions pour l’apprentissage …).

Alors qu’il prétend, à titre temporaire, taxer les plus riches, il prépare surtout 40 milliards d’euros d’économies.

5 milliards de coupes pour les collectivités territoriales ;

Suppression de 4000 postes d’enseignants, alors même que les écoles et établissements sont à l’os, ce qui occasionnerait des cartes scolaires, des DGH catastrophiques, dans la continuité du rapport des inspections générales ;

 Poursuite du gel du point d’indice ;

5 milliards d’économies supplémentaires seront précisées dans les débats.

Par ailleurs 15 milliards de coupes sont annoncées dans le budget de la Sécurité sociale (baisse de la part de remboursement sécu pour les consultations confirmant la logique régressive de la complémentaire santé obligatoire. Gel des pensions, baisse des indemnités journalières…

Et de nouvelles taxes ou hausse de la TVA sur l’électricité ou le gaz vont aggraver les conditions de vie

Ce budget est inacceptable. Son adoption ouvrirait par ailleurs la voie au retour annoncé de plusieurs réformes : poursuite du choc des savoirs, projet de loi Guérini contre la fonction publique …

Et par ailleurs, ce projet de budget ne peut être déconnecté de l’offensive contre l’Enseignement public, avec notamment :

La volonté d’évincer nombre d’élèves du système scolaire dès le collège,

Le processus de militarisation de l’école qui s’étend de façon multiforme, insidieuse : classes engagées du SNU, classes défenses, trinômes académiques, tenue uniques…

Les multiples mesures pour mettre au pas les personnels enseignants : stages de « formation » / formatage des professeurs, personnels de directions convoqués sur des camps militaires en jogging voire en treillis sous couvert de « stages de prévention », etc.

Alors, non, le SNU n’est pas un « gadget », ni une « hypocrisie », ni un « outil vide de sens »2. Et on voit maintenant s’installer devant des lycées des « kiosques de l’engagement » avec des représentants de l’armée3 !

Ce projet de budget intervient après des mobilisations importantes : celle contre les retraites, puis contre le choc des savoirs. Il intervient après les défaites de Macron aux différentes élections, et le score très faible des LR, traduisant la volonté d’en finir avec cette politique. Mais ce gouvernement illégitime et fragile veut poursuivre la même politique, aller plus loin.

L’annonce d’une nouvelle loi immigration indique sa détermination à obtenir l’appui du RN. Il cherche aussi à diviser pour entraver les résistances.

Assurément, la FSU doit combattre ces projets de budgets. Mais quand on lit qu’elle les combattra « en montrant que d’autres choix budgétaires et éducatifs sont possibles », faut-il comprendre qu’il s’agirait de rentrer dans une démarche d’interpellation des députés, dont la majorité est acquise au fait de faire payer les travailleurs ?

Faut-il s’attendre de nouvelles journées d’action, alors même que des journées éparses sont déjà annoncées (dans la santé, pour les retraités…) ?

La responsabilité de notre fédération est d’annoncer qu’elle fera tout pour empêcher l’adoption de ces budgets. Cela implique de préparer une mobilisation nationale sur cet objectif et de s’adresser en ce sens aux autres syndicats, pour gagner.

C’est en infligeant une défaite au gouvernement qu’il sera possible d’imposer d’autre choix budgétaires et d’ouvrir la voie à la satisfaction des multiples revendications du monde du travail.

Intervention Émancipation sur l’action

Macron et son gouvernement ont décidé d’accélérer le tempo des attaques :

– attaque contre les services publics, en premier lieu l’Éducation nationale, l’enseignement supérieur et la Recherche, avec les suppressions de postes, l’appel au privé, l’atteinte aux garanties statutaires.

– attaque contre la protection sociale.

– atteintes aux droits démocratiques avec des débats politiques au sein de l’Université soumis à l’autorisation des présidences universitaires.

– militarisation de l’intervention policière dans les territoires ultramarins (Martinique et Kanaky).

– opprobre généralisée des étrangers avec la mise en exergue de l’immigration choisie et

la brutalisation des migrant.es via un nième loi immigration inspiré par l’extrême-droite.

Ce gouvernement, avec ses annonces budgétaires, veut mener une véritable guerre sociale contre le monde du travail et les services publics.

D’ailleurs l’année dernière la FSU avait décidé de lancer une campagne de promotion des services publics. Sans acrimonie, nous devons constater que cette campagne n ‘a pas vraiment eu de succès et que l’ensemble des citoyen.nes ne s’en sont pas saisi.

De même, dans le cadre de la protection sociale, on peut d’ores et déjà voir les conséquences de la signature de l’accord PSC, signé par l’ensemble des organisations syndicales, dans certains ministères :

Au MASAF, 42 000 agent.es se voient livrer au groupe américain MERCER, filiale du holding MMC Marsh et McLennan Compagnies …

Au Ministère de la Transition écologique (MTEECPR), c’est ALAN qui a remporté le marché, startup financée par des fonds de pension canadiens, singapourien, américain et autres. La MGEN a vu son recours rejeté. Tous cela a de quoi relativisé la signature de combat de la FSU de l’accord PSC, signature à laquelle nous étions un certain nombre à être opposés.

Face à ces colossaux défis, la FSU et l’intersyndicale doivent mobiliser l’Education nationale, l’ESR et l’ensemble des services publics.

Dans ce but, la FSU appelle les personnels s’organiser en comités de défense des services publics avec les usagers, en participant aux AG souveraines à tous les niveaux, pour construire les mobilisations nécessaires à une action nationale de grève.

L’amendement que je vais vous lire défend cette position.

Intervention Émancipation sur la Palestine et le Liban

Le 8 Octobre, Benyamin Netanyahou a menacé le Liban des mêmes souffrances et destructions qu’à Gaza. Cela ne peut être plus clair.

Depuis un an, 42000 Palestinien.nes dont une grande majorité de femmes et d’enfants sont morts, des études étayées avancent même le chiffre de plus de 100 000 tué.es. 42000 mort.es palestinien.nes rapportés à la population de la bande de Gaza, cela ferait en France 1,2 millions soit à peine moins que le bilan de la première guerre mondiale !

Les écoles, hôpitaux, bâtiments résidentiels mais aussi les champs sont anéantis. L’armée israélienne empêche les aides humanitaires ce qui provoque des famines. Le manque d’accès aux soins a même provoqué une résurgence de la poliomyélite, qui avait disparue dans la région depuis 25 ans.

Tous ces faits sont appuyés par les déclarations continuelles des dirigeants israéliens, qui qualifient le peuple palestinien d’animaux humains, de peuple des ténèbres.

Le terme génocide n’est pas seulement utilisé par une partie de la gauche ou l’ONU, mais aussi par des intellectuels israéliens comme l’historien des génocides Omer Bartov qui dit même :

« L’histoire nous a enseigné qu’il est crucial d’alerter l’opinion sur le risque d’un génocide AVANT qu’il ne se produise plutôt que tardivement une fois qu’il a eu lieu ».

Et pourtant la FSU continue de se priver de la qualification de génocide.

Depuis un mois, le gouvernement colonial d’Israël attaque en plus le Liban faisant plus de 1200 morts en moins d’un mois et 1,2 millions de déplacé.es. La stratégie militaire est la même qu’à Gaza : bombardements, troupes au sol, déplacement de population, utilisation de drones.

En 2022, l’invasion par une armée étrangère d’un pays indépendant avait déclenché des sanctions multiples envers la Russie : des sanctions politiques avec le retrait des diplomates, économiques avec suspension d’accords commerciaux, sportives avec le retrait des sportifs russes de compétitions internationales. La FSU doit exiger des gouvernements occidentaux la prise de telles sanctions, d’arrêter les relations avec les universités israéliennes et aussi de cesser les ventes d’armes.

A ce propos, le 5 Octobre Macron disait sur France Inter que la France n’envoyait pas d’armes létales en Israël. Pourtant, le média d’investigation Disclose a révélé qu’au moins deux entreprises françaises, Eurolinks et Thalès, avaient livré des composants militaires à Israël après le 7 octobre 2023.

De plus, nous demandons à la FSU de signer la pétition et de s’investir dans la campagne contre la présence d’entreprises israéliennes au salon Euronaval de la défense qui aura lieu début Novembre.

La FSU doit s’investir aussi pleinement dans les campagnes BDS. Celles-ci portent leur fruit, puisqu’AXA a été contrainte de vendre ses investissements dans toutes les grandes banques israéliennes et dans l’entreprise d’armement israélienne Elbit.

Enfin, nous demandons que la FSU se positionne pour la liberté de débat politique et donc le retrait de la circulaire envoyée aux présidents d’université par le ministre Hetzel.

  1. https://fr.wikipedia.org/wiki/Alan_(entreprise) ↩︎
  2. cf la tribune parue dans Le Monde, 2 oct 2024 https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/10/01/le-service-national-universel-est-une-hypocrisie-et-une-gabegie-financiere-il-est-temps-de-l-abandonner_6340849_3232.html ↩︎
  3. https://www.ac-lyon.fr/les-kiosques-de-l-engagement-129144 ↩︎

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