Émancipation


tendance intersyndicale

Soutien à Gaza : à propos de quelques mises en cause

Nous reproduisons ci-dessous un communiqué de l’UJFP. Il répond à des tribunes mettant en cause le mouvement de solidarité avec le peuple palestinien.

Mise au point : antisémitisme, irresponsabilité, l’UJFP répond à ses détracteurs

Coup sur coup, l’UJFP est attaquée par des gens qui se disent « de gauche », « progressistes », « laïques », « antiracistes ».

L’UJRE (Union Juive pour la Résistance et l’Entraide) accuse l’UJFP de tenir des discours intolérables, de soutenir le Hamas et de méconnaître l’histoire des FTP-MOI.

Dans un blog de Médiapart , une cinquantaine de personnes qui affirment « avoir une solidarité et un soutien tourné vers les Gazaoui.es » (???) accusent Urgence Palestine d’abriter des antisémites, de faire l’apologie du terrorisme et de reprendre le protocole des Sages de Sion. Au passage, l’UJFP est accusée de comparer les Israéliens aux nazis.

Nos détracteurs, largement absents du mouvement antiraciste et totalement absents du mouvement de solidarité avec la Palestine, n’ont rien trouvé de mieux à faire en plein génocide à Gaza que de diffamer des juifs antisionistes et des associations de solidarité internationale.

D’où cette mise au point :

1. Un génocide d’une ampleur inouïe se déroule depuis le 7 octobre contre la population de Gaza. Il y a plus de 40 000 mort.es ou disparu.es. À l’échelle de la France, ça représenterait plus d’un million de personnes. Face à cette horreur, une mobilisation soutenue est indispensable pour aider le peuple palestinien à survivre et pour forcer, par nos manifestations et nos actions, les gouvernements complices d’Israël à prendre leurs responsabilités et à sanctionner les génocidaires. Nos détracteurs, totalement absents des mobilisations en soutien au peuple palestinien, ont d’autres préoccupations : dénigrer les Palestinien.nes, le mouvement de solidarité et les rares partis politiques qui ne hurlent pas avec les loups, mais rappellent la nécessité de l’application du droit international.

2. L’antijudaïsme chrétien, puis l’antisémitisme racial et le génocide nazi font partie de l’histoire européenne. Les Palestinien.nes ont payé et continuent de payer pour un crime européen. Ces derniers étant considérés comme « des animaux humains », des « nazis », des « antisémites », alors bien sûr tout est permis : les assassiner, y compris les femmes et les enfants comme l’ont théorisé de nombreux dirigeants israéliens, épinglés par la Cour Internationale de Justice. Les Palestinien.nes n’amalgament pas Israéliens et juifs. Nous pouvons assurer que, quand on est juif et qu’on va en Palestine, la réponse quasi-unanime est : « nous sommes contre l’occupation, nous n’avons rien contre les Juifs ». Nos détracteurs y sont-ils allés ?

3. Les ¾ des habitant.es de la bande de Gaza sont des réfugié.es. Ils sont les descendant.es de ceux qui ont été victimes d’un nettoyage ethnique prémédité en 1948. Gaza est occupé depuis 1967. Le territoire est bouclé par terre, par mer et par air depuis 17 ans. L’occupant y organise la pénurie d’eau et d’électricité comme il organise aujourd’hui la famine. Le territoire a subi une dizaine de bombardements et d’attaques meurtrières depuis 2008. Les marches du retour, pourtant totalement pacifiques ont été attaquées avec férocité : 350 mort.es et 10 000 estropié.es. Nos détracteurs n’ont pas hurlé au racisme lors de cette répression féroce.

4. Alors oui, nous le répétons, le 7 octobre la cocotte-minute a explosé (la phrase est de Michel Warschawski) comme elle avait explosé en Algérie le 1er novembre 1954. C’est l’occupant qui a été attaqué le 7 octobre, pas les Juifs. Et nous faisons nôtres ce qu’ont dit et répété les anticolonialistes israéliens : « nous avons des ami.es parmi les mort.es et les personnes enlevé.es. Le responsable, c’est le régime colonial et suprémaciste israélien, c’est l’occupation ». Mais nos détracteurs ne citent pas une seule fois les mots « colonialisme », « occupation », « suprémacisme ».

5. Nos détracteurs reprennent le récit des autorités israéliennes sur le 7 octobre. Croire sur parole ce que dit la « Hasbara » est un peu étrange chez des gens qui se disent de gauche. Ce récit a été remis en cause à plusieurs reprises, notamment par les enquêtes de Haaretz et de Libération. Personne ne connaît la réalité de ce qui s’est déroulé. Amnesty International dénonce des crimes de guerre, nous nous en tiendrons là. Et, comme les Palestinien.nes, nous sommes demandeurs d’une enquête internationale pour savoir réellement ce qui s’est passé et condamner les coupables.

Mais mettre sur un même plan l’occupant et l’occupé, le colonisé et le colonisateur, est indigne de la gauche. Israël n’a pas « riposté » après le 7 octobre. La Palestine est attaquée en permanence par l’occupation sioniste depuis 1948 : vols de terres, exécutions sans jugement, emprisonnement massif, bombardements …

L’État d’Israël coche les cases : « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité », « apartheid », « génocide ».

Diaboliser le Hamas et accuser l’UJFP et le mouvement de solidarité d’être les complices du Hamas rejoint le discours des médias dominants qui soutiennent les génocidaires. Israël ne mène pas une guerre contre le « terrorisme du Hamas ». Il s’agit d’une guerre de destruction totale de la société palestinienne, attaquée par l’occupation sioniste depuis 1948. Les dirigeants israéliens ne veulent pas de « partenaire pour la paix ». Ils veulent un maximum de terre et un minimum de Palestinien.nes.

Quand les principaux mouvements de résistance étaient le Fatah et le FPLP, ils ont favorisé la montée du Hamas. Les accords d’Oslo se sont révélés être une vaste supercherie. La division palestinienne avec deux gouvernements rivaux a été voulue par l’occupant.

La victoire électorale du Hamas en 2006 est une conséquence de l’occupation et de la colonisation. Qualifier le Hamas « d’extrême droite » montre une ignorance totale de ce qu’est la Palestine. Les assimiler à Daesh aussi. L’ONU ne qualifie pas le Hamas de terroriste.

La société gazaouie était, avant le 7 octobre, pluraliste, vivante, critique, animée par une multitude d’associations de la société civile.

L’UJFP, comme Urgence Palestine, soutient le peuple palestinien, victime d’un génocide.

Instrumentaliser l’antisémitisme (qui est l’histoire intime de beaucoup de membres de l’UJFP) pour faire taire le mouvement de solidarité est vital pour les dirigeants israéliens. Nétanyahou, reprenant les propos de Ben Gourion, au moment du procès Eichmann, a expliqué en 2015 « qu’Hitler ne voulait pas tuer les Juifs » et que c’est le grand mufti qui lui a soufflé l’idée. Cette affirmation, de l’ordre du négationnisme, vient appuyer les considérations selon lesquelles les musulmans sont antisémites, pas l’extrême droite européenne ou les chrétiens sionistes. Dans le même temps, Israël est soutenu par l’extrême droite raciste, partout dans le monde.

En Allemagne, tout soutien à la Palestine est criminalisé et les « Antideutsche », qui se prétendent révolutionnaires, participent activement à cette criminalisation. L’UJRE et les pétitionnaires dans Médiapart aspirent visiblement à jouer le même rôle. Dénigrer le mouvement de solidarité, le diffamer et s’autoproclamer en même temps défenseurs du peuple palestinien.

À l’UJFP, nous continuerons à lier la lutte contre le racisme avec celle pour les droits du peuple palestinien. Quand les paysans de Gaza inscrivent « UJFP » sur le château d’eau (détruit par l’armée israélienne le 6 février), quand des équipes gazaouies avec des logos UJFP distribuent des repas à une population affamée, nous ne faisons pas que soutenir activement la population palestinienne. Nous luttons aussi contre l’antisémitisme. Dans les faits.

Enfin, l’UJRE n’a pas apprécié notre communiqué sur Manouchian. L’UJFP n’est pas la seule association à estimer qu’il y avait un côté obscène à voir un gouvernement légalisant la préférence nationale et annonçant la fin du droit du sol s’autoproclamer garant de la mémoire de la MOI. En plus, il a osé faire porter les cercueils par la Légion Étrangère.

Lors de la cérémonie à la mémoire des 4 FTP-MOI d’Arcueil, le maire de cette ville a développé les mêmes arguments que l’UJFP.

L’UJRE écrit que les FTP-MOI étaient des « patriotes ». Non, ils étaient des internationalistes. Ces étranger.es pensaient que leur émancipation passait par celle de l’humanité. Nous aussi, c’est tout le sens de notre engagement.

Les antinazis ont juré après 1945 : « plus jamais cela ». Nous sommes fidèles à leur mémoire en combattant les auteurs du génocide actuel et leurs complices. En considérant que le sionisme n’est pas seulement criminel contre les Palestinien.nes, mais est suicidaire pour les Juifs.ves et est aussi une injure à leur histoire et à leur identité, nous sommes fidèles à la mémoire des FTP-MOI.

La Coordination nationale de l’UJFP, le 27 février 2024


Publié

dans

Étiquettes :