Un projet de permaculture en milieu urbain
L’objectif de ce projet est de créer des jardins sur le toit du parking de la faculté des sciences de La Rochelle Université, conçus selon les principes de la permaculture, qui permettent de cheminer vers une alimentation durable des étudiant·es et des personnels, de favoriser la biodiversité (sauvage et cultivée), en utilisant les déchets produits par la communauté urbaine.
Le but de ce projet expérimental est pédagogique
Dans un contexte actuel où les centres urbains sont de plus en plus minéralisés, il est nécessaire de créer des espaces refuges pour la flore, la faune et les humains, dans lesquels le vivant est respecté. La permaculture constitue un modèle parfaitement adapté à la reconnexion de l’Humain avec son environnement. En ce sens c’est un outil pertinent qui permet de transformer nos lieux de vie en écosystèmes productifs et résilients tout en s’inspirant de la nature.
Ce projet a donc été conçu en respectant les trois filtres éthiques de la permaculture : prendre soin de la Terre, prendre soin de l’Humain et partager équitablement nos ressources.
Né en 2019, notre projet rassemble les étudiants désireux de végétaliser cette cour bétonnée, pour plus de bien-être, ceux et celles qui suivent l’enseignement de Permaculture en milieu urbain qui disposent d’un modèle pédagogique in situ, ainsi que des bénévoles étudiant·es et personnels de l’établissement adhérant à cette dynamique.
Le lieu
Cette cour de 1400 m2, véritable désert minéral de verre et de béton, n’offrait pas la convivialité et la fonctionnalité d’un lieu d’échanges. Orienté au sud, il constitue un ilot de chaleur six mois par an fort désagréable pour les humains qui vivent dans les bureaux, les couloirs, et salles de cours attenantes.
L’idée d’une poignée d’étudiant·es en sciences de la vie en 2019 de végétaliser cet espace nous a conduits à concevoir un jardin productif qui respecte les contraintes liées aux terrasses et toitures végétalisées : respect de la charge maximale de 400 kg/m2² sur le toit du parking, collecte des eaux pluviales très compliquée, réversibilité des installations.
L’originalité du projet consiste à créer ce jardin sans terre des champs, trop lourde pour un toit et qui n’est pas une ressource renouvelable à l’échelle des temps humains et en valorisant les déchets produits par l’agglomération de La Rochelle. Ainsi voiles de bateau, liner de piscine, sacs de jute, gaines électriques de chantier, poches à huitres, fûts alimentaires et palettes sont réutilisés. Les eaux pluviales n’étant pas récupérables, nous avons imaginé une culture sur nappes phréatiques artificielles. Cette technique, classique sur de petites jardinières autonomes (wicking bed) est une expérimentation unique à ce jour sur des zones de culture entre 20 et 30 m2 en fonction de la taille des liners de piscine récupérés.
La couche de culture (Technosol) inspirée des travaux de la thèse de Baptiste Grard sur les toits de AgroParisTech- INRAE, est constituée des déchets organiques tels les drêches de bières produites par la brasserie de l’Université, le compost et broyat de bois fournis par la CDA et transportés par la ville de La Rochelle qui nous fournit aussi du fumier de cheval et du foin des espaces verts alentour.
Ce projet vise aussi à changer notre regard sur les déchets dans une démarche d’économie circulaire locale. La loi sur la généralisation du tri à la source des biodéchets prévue au 1er janvier 2024 pour tou·tes les producteur·trices est anticipée grâce à des composteurs végétalisés (keyhole garden) qui illustrent bien le cycle de la matière organique.
La biodiversité s’enrichit à chaque saison un peu plus : outre les nichoirs, un hôtel à insectes a été construit, mais l’intervention de la LPO nous a permis de comprendre que les modèles classiques pouvaient parfois servir de garde-manger pour des prédateurs ! Nous nous orientons donc vers des hôtels monospécifiques.
Événements
Un atelier hebdomadaire est organisé “Jeudi tout est perma !”. Nous participons à chacune des éditions des “48h de l’agriculture urbaine”, “Tous au compost”, “Semaine Zero carbone”.
Un atelier de bouturage de vignes résistantes aux maladies est organisé chaque hiver. Nous accompagnons les autres projets qui naissent à l’université.
Enfin, la qualité sanitaire des aliments produits sera surveillée. L’eau des nappes phréatiques artificielles créées ainsi que les végétaux produits seront analysés. La recherche portera sur les teneurs en éléments traces métalliques (Cd, Cu, Pb, Zn et Hg) et en polluants organiques les plus préoccupants (HAP, PCB, phtalates) mais aussi sur la teneur en micronutriments comme les antioxydants qui peuvent être bénéfiques pour la santé.
Quand on favorise la vie, elle revient au galop, même sur le béton !
Patrick Chevaleyre, Jardins d’Orbigny