Flora Tristan
Enfant illégitime d’un colonel de l’armée espagnole, Flora Tristan se définissait elle-même comme une “paria”, une exclue, non seulement en raison de sa condition de fille naturelle mais aussi à cause de son ressenti de déclassement social et de sa subordination au système patriarcal. Très vite, elle épouse la cause ouvrière, elle prône l’unité ouvrière internationale et se bat pour faire prendre en compte le combat féministe dans le socialisme. Son voyage au Pérou, à la recherche de ses origines paternelles, lui permet de découvrir et de dénoncer l’esclavage. Immergée dans les débats du mouvement socialiste de l’époque, Flora Tristan écrit Union ouvrière, qui devient une référence. Elle sillonne la France et donne de multiples conférences pour la promotion du livre qui la conduisent sur les routes de l’est et du sud de la France. Ce périple lui provoque un épuisement fatal. Cette biographie nous fait découvrir les multiples facettes de sa vie.
Floria Tristan, une insoumise sous le règne de Louis-Philippe, Olivier Gaudefroy, éditions Syllepse, avril 2022, 128 p., 9 €.
L’autogestion en Algérie
En 1962, à l’indépendance de l’Algérie, un million d’hectares, des centaines d’entreprises sont délaissés par leurs propriétaires coloniaux. Spontanément, paysan·nes et travailleur·euses s’en emparent. Les résistances sont fortes : l’armée s’octroie une bonne partie des terres, dans beaucoup d’entreprises et de fermes le pouvoir des travailleur·euses est confisqué par une nouvelle bourgeoisie qui entend accaparer la révolution à son profit avec la complicité de l’administration. Dans ce recueil qu’il introduit, Mohammed Harbi, alors responsable du Bureau national d’animation du secteur socialiste, a sélectionné une série de rapports d’enquêtes sur le terrain, d’articles de l’hebdomadaire Révolution africaine dont il était le directeur, de textes et documents, pour la plupart inédits ou jusqu’ici inaccessibles. Alors que le Hirak réclame une nouvelle révolution, ce livre vient rappeler l’histoire d’une autre révolution possible, celle de l’autogestion algérienne.
L’autogestion en Algérie Une autre révolution ? (1963-1965), Mohammed Harbi, éditions syllepse, avril 2022, 346 p., 15 €.
Récits intimes pour un féminisme révolutionnaire
Le féminisme n’a jamais cessé d’insister sur l’importance du récit intime. Croisant histoires familiales, théories politiques et faits historiques, Irene, militante féministe, tire ici de la vie d’Hilaria, son aïeule, des armes pour outiller les mouvements féministes contemporains. Hilaria est une femme du prolétariat basque, veuve, qui élève seule ses enfants. Le tragique et le chaos de leur existence dans les années 1930 n’auront jamais raison de leur joie de vivre et de leur soif de construire un monde désirable. Puisque la démocratisation d’un féminisme réformiste et libéral ne nous sera d’aucun secours, c’est au féminisme d’Hilaria qu’il importe de revenir, un féminisme populaire qui se dit tout à la fois anarchiste, antifasciste, anticapitaliste et anticarcéral.
Hilaria Récits intimes pour un féminisme révolutionnaire, Irene, éditions Divergences, avril 2022, 154 p., 14 €.
De la liberté et de l’oppression sociale
Il s’agit là de l’édition la plus complète et la plus abordable de l’essai que Simone Weil considérait comme son “Grand Œuvre” (établie et révisée à partir de la dactylographie originale déposée à la BnF). Robert Chenavier, spécialiste de l’œuvre, l’a enrichie d’un appareil critique dense. Il l’a également complétée d’une étude inédite intitulée Transposer la pensée de Simone Weil, faisant ressortir l’originalité et la contemporanéité des thèses d’une philosophe devenue ouvrière qui voulait nous éviter de “périr impuissants à la fois à réussir et à comprendre”.
Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale, Simone Weil, suivi de Transposer la pensée de Simone Weil, Robert Chenavier, éditions Libertalia, avril 2022, 360 p., 7,90 €.