Émancipation


tendance intersyndicale

Un congrès du renoncement ou d’un nouveau départ ? (suite 1)

Recrutement et formation des enseignant·es

La crise du recrutement des enseignant·es s’est encore aggravée, notamment du fait du mépris affiché par Blanquer et le gouvernement, qui se traduit entre autres par des salaires parmi les plus bas de l’Union européenne, et par des conditions de travail et de protection sanitaire notoirement dégradées. Les causes en sont multiples et l’organisation actuelle du parcours de formation des étudiant·es qui se destinent à l’enseignement est l’une d’elles.

De fait, les étudiant·es qui se destinent à l’enseignement sont utilisé·es comme moyens d’enseignement à coût réduit. Ainsi les étudiant·es en Master MEEF se voient proposer des contrats d’alternance où ils/elles sont placé·es en responsabilité face aux élèves pour un service hebdomadaire entre six et douze heures pour un total annuel de 288 heures dans le premier degré, entre trois et neuf heures dans le second degré pour un total de 240 heures, et douze heures par semaine pour les étudiant·es en documentation. Cela pour un traitement mensuel de 865 euros brut !

Les concours de recrutement sont déplacés en fin de M2 et comportent une épreuve orale qui relève de l’entretien d’embauche. À l’issue du concours les stagiaires issus des Masters MEEF sont mis en responsabilité face aux élèves à temps plein.

Ainsi, pour le ministre Blanquer, c’est la prise en charge d’élèves sans formation préalable et à bas coût qui tient lieu de formation !

La FSU doit se prononcer pour l’abrogation de la réforme de la formation des enseignant·es

Elle doit demander une véritable formation professionnelle initiale, après le concours, payée par l’État, ainsi que le rétablissement du droit à la formation continue (au choix du fonctionnaire) et payée par l’État (c’est à dire, sur le temps de travail).

C’est pourquoi la FSU doit revendiquer :

• des pré-recrutements égalitaires à l’issue du Bac, ouvrant droit au statut de fonctionnaire stagiaire ;

• des concours de recrutements à l’issue de la 3ème année de Licence, ouverts aux personnes qui n’auront pas été pré-recrutées ;

• la mise en place d’Unités d’Enseignement optionnelles de découverte et de sensibilisation au sein de licences réorganisées après l’abrogation de la LRU et des arrêtés “Licence” qui en ont découlé, ouvrant la voie à des concours rénovés ;

• l’indépendance des structures de formation vis-à-vis des tutelles pédagogiques, hiérarchiques et territoriales. La formation dans ces structures, conçues comme des écoles professionnelles universitaires spécialisées, doit s’inscrire dans un cadrage national évitant l’atomisation des formations. Elles doivent disposer de moyens suffisants ;

• une formation largement ouverte aux pédagogies actives centrées sur la coopération ;

• deux années de formation professionnelle initiale après l’obtention du concours, rémunérées sous statut de fonctionnaire stagiaire, et une entrée progressive dans le métier, et ce pour toutes les catégories de personnels. Le service doit être limité à 1/3 du service d’un personnel titulaire ;

• la reconnaissance pleine et entière d’un niveau de qualification à Bac+5, comme c’est le cas par exemple pour d’autres écoles professionnelles (écoles d’ingénieurs) et la délivrance d’un diplôme de Master à l’issue des deux années de formation suivant le concours ;

• une première année de fonctionnaire titulaire avec un service réduit, permettant d’articuler acquis théoriques (aussi bien disciplinaires que didactiques) et pratiques pédagogiques. (thème 1)

La stratégie de la FSU à l’épreuve des mobilisations de forte intensité

La mobilisation aux Antilles : l’occasion d’un nouveau départ…

Après le mouvement des Gilets jaunes, celui contre le passe sanitaire est le deuxième mouvement d’ampleur dans lequel les organisations syndicales ne sont pas intervenues en tant que telles. Si dans certaines publications de la fédération, le mouvement des Gilets Jaunes apparaît comme un signe de la vitalité du mouvement social en France, la FSU ne s’était pas impliquée dans la phase puissante du mouvement qui a pourtant duré plusieurs mois. Dans la déclaration intersyndicale du 6 décembre 2018, en dénonçant “toutes formes de violence dans l’expression des revendications” sans dénoncer les violences policières et judiciaires sur le mouvement et en reconnaissant l’ouverture du gouvernement au dialogue dont nous mesurons trois ans après la réalité, on ne peut pas dire que la FSU nationale se soit positionnée en soutien au mouvement des Gilets jaunes.

Les mobilisations actuelles aux Antilles donnent cependant l’occasion à la fédération de se rattraper en partie et de se positionner clairement du côté des mobilisations. Notamment en soutenant la plate-forme de revendications en 32 points portées par des organisations syndicales en Guadeloupe, en dénonçant la répression de l’État français et soutenant les actions de grève et de blocage routier choisies pour établir un rapport de force pour les négociations.

… transformé en une nième démonstration d’aliénation au dialogue social

Dans son communiqué du 25 novembre “Solidarité avec la Guadeloupe et la Martinique”, la FSU demande l’ouverture de négociations associant l’ensemble des parties prenantes dont toutes les organisations syndicales sans exception “parce qu’elle souhaite que le calme revienne”. Quelles revendications dans la plateforme en 32 points justifieraient que la FSU ne s’y associe pas ? Si le calme découlera de la satisfaction des revendications, la réciproque sera-t-elle vraie ? Pour quoi alors afficher “le calme” comme objectif premier plutôt que de soutenir le mouvement ?

Encore une fois, le syndicat se pose comme médiation entre le mouvement social et le gouvernement. Mais qu‘avons nous récolté avec cette stratégie depuis des années ? En admettant que le deal suivant soit souhaitable : l’hostilité des personnes vis à vis des syndicats qui ne les aident pas dans leurs mobilisations est-elle compensée par un renforcement du poids syndical dans les décisions politiques ? La suppression des CAPA est une nième démonstration que nous n’avons rien à gagner avec le mode de gouvernance du “dialogue social”. Le syndicalisme doit s’en émanciper ! (thème 4)