La notion d’antisémitisme évoque spontanément des siècles de discriminations, de massacres, d’expulsions, de stéréotypes racistes, culminant au milieu du XXe siècle par le plus grand génocide commis sur le continent européen.
Persécution et domination
La persécution des Juif/ves a d’abord été une question religieuse. Aucune religion monothéiste n’a jamais réellement accepté une religion différente, les guerres de religion nous le rappellent douloureusement. Très tôt, ne l’oublions jamais, l’Europe chrétienne a déclaré les Juif/ves “déicides” et coupables de crimes rituels. Elle a édicté contre eux toute une série d’interdits, dont celui de posséder la terre et les a régulièrement spolié·es et expulsé·es. Elle les a enfermé·es dans des quartiers spécifiques. On vient de célébrer à Strasbourg l’anniversaire du 14 février 1349 quand 2000 Juif/ves de la ville, accusé·es d’avoir propagé la Peste Noire, furent brûlé·es. Ailleurs en Europe, les moments les plus terribles de l’antijudaïsme chrétien ont été la Première Croisade, l’Inquisition aboutissant à l’expulsion d’Espagne et les massacres de Khmelnitsky en Ukraine.
Dans le monde musulman, les Juif/ves ont certes aussi été confiné·es dans des quartiers spéciaux, mais il n’y a eu rien de comparable à la persécution chrétienne. Une cohabitation mutuellement enrichissante a même existé à l’époque de l’émirat de Cordoue.
Le mot “antisémite” est impropre, c’est le mot de l’ennemi, en l’occurrence, il vient d’un des premiers racistes biologiques, l’Allemand Wilhelm Marr (1819-1904). Au milieu du XIXe siècle, l’antisémitisme racial se superpose en effet à l’antijudaïsme chrétien.
Plusieurs facteurs ont joué. Citons-en trois :
– Avec l’émancipation (qui commence en France et en Allemagne) et la sortie du ghetto, les Juif/ves deviennent une minorité invisible, objet de tous les délires : “ils sont partout”, “ils veulent dominer le monde”.
– Avec la décadence puis l’éclatement des grands empires (russe, autrichien, ottoman), naissent en Europe des nationalismes exclusifs, qui rêvent de créer des États ethniquement purs pour lesquels les Juif/ves sont un obstacle au rêve de pureté. Tous ces nationalismes concurrents et exacerbés, qui mèneront à la Première Guerre Mondiale, seront antisémites.
– Pendant cette période, l’Europe domine le monde. Le/la Noir·e ou l’indigène en général sont considéré·es comme des inférieur·es qui n’ont pas accédé à la civilisation. Le colonialisme est omniprésent. Des anthropologues, des historien·nes, des intellectuel·les vont propager l’idée qu’il y a des races et qu’elles sont inégales. Les Juif/ves, assimilé·es à une prétendue “race sémite”, vont devenir les “parias” de l’Europe (l’expression est de Hannah Arendt). L’antijudaïsme chrétien qui a forgé l’antisémitisme populaire est relayé par les théories racialistes et gagne les classes dirigeantes.
L’antisémitisme devient un racisme d’État en Russie dès 1881.
Sionisme et antisémitisme Le sionisme est une réponse à l’antisémitisme. Il répond en prônant la séparation des Juif/ves et des non Juif/ves et la colonisation d’un nouveau territoire qualifié de “terre sans peuple pour un peuple sans terre”. Il reprend la conception nationaliste d’un État-nation ethniquement pur. Ceux/celles qui ont été exclu·es vont devenir ceux/celles qui excluent. Le colonialisme qu’ils/elles prônent ne vise pas à assujettir le peuple colonisé, mais à l’expulser et le remplacer.
Les antisémites verront en général le sionisme d’un bon œil. Des dirigeants européens antisémites, comme le ministre russe Plehve, l’empereur allemand Guillaume II ou le ministre britannique Balfour trouveront intéressante l’idée de débarrasser l’Europe de ses Juif/ves en les transformant en colons européens.
Certain·es peuvent s’étonner qu’aujourd’hui, des dirigeant·es israélien·nes puissent être les meilleur·es ami·es d’antisémites ou de révisionnistes (ceux/celles qui nient aujourd’hui l’existence des chambres à gaz ou minimisent l’ampleur du génocide nazi). Peut-être parce qu’on ne veut pas voir qu’une partie du mouvement sioniste partageait déjà, il y a un siècle, des valeurs communes avec l’extrême droite raciste. C’est en tout cas un fait en ce qui concerne le courant “révisionniste” de Jabotinsky et de ses disciples Begin, Shamir et aujourd’hui Netanyahou.
L’antisémitisme est-il un racisme à part ?
On dit souvent “le racisme et l’antisémitisme”. L’antisémitisme a été incontestablement un racisme à part pendant la Deuxième Guerre mondiale. Tous les racismes ne mènent pas à l’extermination systématique du peuple haï. L’ampleur du génocide qui a emporté la majorité des Juif/ves de l’Europe occupée, l’utilisation de méthodes de mise à mort industrielles utilisées par la plus grande puissance de l’époque, l’extermination étendue aux enfants, tout ceci a un caractère “unique” et épouvantable.
Mais il est très dangereux de rentrer dans une forme de “concurrence des victimes”. Si l’antisémitisme a perduré après 1945 et perdure toujours, il n’est plus de même nature qu’au moment d’Auschwitz, du ghetto de Varsovie ou de la rafle du Vel d’Hiv. Il n’existe plus de pays dont la doctrine soit l’extermination des Juif/ves.
La destruction des Juif/ves d’Europe (pour reprendre l’expression de Raul Hilberg) n’a pas été le seul génocide de l’histoire. La traite et le colonialisme sont des crimes contre l’humanité qui ont la particularité d’avoir duré des siècles et, en ce qui concerne le colonialisme, de ne s’être jamais terminé. D’autres communautés humaines ont été exterminées par les Nazis, en particulier les Roms et, contre eux, les discriminations étatiques n’ont pas cessé après la guerre. Après la guerre, l’antisémitisme ne disparaît pas. On doit bien comprendre que le 8 mai 1945, c’est l’Allemagne nazie qui est défaite, pas les idées qui ont permis son ascension. Symboliquement, le 8 mai 1945, c’est aussi le massacre de milliers d’Algérien·nes à Sétif et Guelma. Le racisme continue de proliférer en Europe et il frappe essentiellement les Arabes, les Noir·es, les Rom·es.
La réponse au génocide nazi, cela doit être de tout faire pour que CELA N’ARRIVE PLUS JAMAIS. Donc qu’on éradique le racisme, le suprématisme, le colonialisme, les discriminations, l’inégalité. Tragiquement, la réponse sioniste a été : que cela ne NOUS arrive plus jamais. Et ça veut dire l’inverse. Cela veut dire que des Juif/ves peuvent reprendre contre d’autres la brutalité dont ils/elles ont été victimes.
La Palestine
Après le génocide, il serait faux de penser que les vainqueurs se sont sentis coupables. Si cela avait été le cas, ils auraient accordé l’asile aux rescapé·es du Yiddishland. Il y aurait eu un message du genre : “les Juif/ves, on est désolé, maintenant, vous aurez la pleine citoyenneté et l’égalité. On ne permettra plus l’antisémitisme”. Le message n’a pas été celui-là. Il a été en gros : “maintenant, vous avez un pays, vous partez quand vous voulez”.
L’Europe et la communauté internationale se sont débarrassées de leur responsabilité en ce qui concerne l’antisémitisme et le génocide sur le dos des Palestinien·nes qui n’avaient pas la moindre responsabilité dans ces crimes.
Les sionistes au Proche-Orient ont, dès le départ, parlé au nom de tous les Juif/ves, méprisant les Juif/ves autochtones qui avaient toujours vécu en paix avec leurs voisin·es musulman·es ou chrétien·nes. Comment les Palestinien·nes peuvent-ils utiliser un autre terme que “yahoud” (juif) pour parler du proto-état créé sous le parapluie du colonisateur britannique, qui commence les attentats meurtriers contre les autochtones dès les années 1930 ?
L’État d’Israël est, dès sa fondation et de par la volonté de ses fondateurs, un État juif, réservé aux Juif/ves. Sa fondation s’accompagne d’un crime contre l’humanité : l’expulsion préméditée de la grande majorité de la population autochtone. Cet État juif invente une belle histoire pour masquer ce crime : après 2000 ans d’exil, les Juif/ves rentrent chez eux/elles. Les dirigeant·es de cet État seront, d’entrée, négationnistes (j’emploie ce terme à dessein) vis-à-vis de l’existence, des droits et de la dignité du peuple palestinien. Il ne s’agit pas d’un génocide, comme ce que les Juif/ves d’Europe venaient de subir, mais d’un ethnocide, d’un sociocide, visant à effacer la trace d’une population et à l’empêcher d’exister en tant que peuple. Des centaines de villages palestiniens ont été détruits et les noms des lieux ont été changés. Les sionistes ont toujours espéré que les Palestinien·nes, à l’image des Amérindien·nes ou des Aborigènes, disparaîtraient ou seraient enfermés dans leurs réserves : “les vieux mourront, les jeunes oublieront”, phrase attribuée à Ben Gourion.
En 1948, la grande majorité des Juif/ves ne vit pas en Israël. Mais la “loi du retour”, qui permet à tout Juif/ve de venir remplacer les Palestinien·nes expulsé·es, concerne tous les Juif/ves, où qu’ils/elles vivent.
Plus tard, les colonies qui balafrent la Cisjordanie seront appelées colonies juives, les Palestinien·nes et leurs dirigeant·es seront traité·es de nouveaux Hitler voulant prolonger l’œuvre des nazis.
Aujourd’hui, avec la loi “Israël, État-nation du peuple juif”, le doute n’est plus permis : ce qui se fait là-bas au nom des Juif/ves, avec l’admiration et le soutien des principaux dirigeant·es de ce monde, est une entreprise raciste, suprématiste, colonialiste, militariste. Cela n’a rien à voir avec l’histoire, la mémoire et les identités juives. Mais les institutions censées parler au nom des Juif/ves partout dans le monde appuient cet apartheid et on ne peut pas faire comme si cela n’existait pas.
Une stratégie délibérée : l’instrumentalisation de l’antisémitisme
Petit à petit, l’équation juif = sioniste et donc antisioniste = antisémite a été imposée avec l’aide complaisante de beaucoup de médias.
Le monde arabe et les musulman·es, qui n’avaient (sauf exception) aucun passé douloureux avec les Juif/ves, sont aujourd’hui taxé·es d’antisémitisme, Netanyahou allant jusqu’à tenir contre eux d’incroyables propos révisionnistes : “Hitler ne voulait pas tuer les Juifs, c’est le grand mufti [de Jérusalem] qui lui a soufflé l’idée”.
Les dirigeant·es politiques qui sont sensibles à la cause palestinienne sont des dangers pour les sionistes et, pour leur barrer la route, on les taxe d’antisémitisme. C’est ce qui est arrivé à Jeremy Corbyn.
La société israélienne assumant de plus en plus le colonialisme, les discours racistes et l’enfermement de la société palestinienne, c’est logiquement à droite et à l’extrême droite qu’on va trouver les nouveaux/velles défenseur·es d’Israël. Or ceux/celles-ci sont profondément antisémites (Trump, Orban, les chrétiens sionistes…) ou ont des liens historiques avec les auteurs du génocide nazi. On verra pourtant tous les dirigeant·es de l’extrême droite européenne défiler en Israël et dans les colonies. En Europe de l’Est où tous les pays sont des amis d’Israël, des statues glorifient ceux qui ont guidé les Einsatzgruppen (les unités nazies qui, entre 1940 et 1943 ont assassiné des centaines de milliers de Juif/ves, Tsiganes, Russes, Polonais·es…). En Israël, un colon d’extrême droite vient d’être nommé à la direction du musée Yad Vashem, censé garder la mémoire du génocide.
A contrario, la gauche et les musulman·es sont taxés d’antisémitisme. Les Juif/ves qui défendent le “vivre ensemble dans l’égalité des droits” sont considéré·es comme des traîtres ayant la “haine de soi” et sont traîné·es dans la boue. Le regretté Jean Ferrat (dont le père est mort à Auschwitz) a été accusé par le journal L’Arche d’antisémitisme pour avoir écrit dans sa chanson Nuits et brouillard :
Ils s’appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel
Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou…
Pour les manipulateurs de la mémoire, c’est une négation de la spécificité du génocide juif. Non, la mémoire du génocide est universelle !
Quand le pouvoir en France met les Juif/ves à part
Depuis 1945, l’antisémitisme n’est plus un racisme d’État en France. Dans la population, il a reculé mais bien lentement. Des sondages montrent que, jusque dans les années 1960, une majorité des Françaises et de Français désapprouvaient le fait que leur enfant épouse une juive ou un juif. L’Église n’a jamais reconnu le rôle du pape pendant la guerre et elle a tardivement et timidement considéré que les Juif/ves n’étaient pas déicides. L’extrême droite, à la faveur des guerres coloniales, est vite réapparue. N’oublions jamais que le régime de Vichy a joui d’un soutien populaire certain. Avec Poujade puis Le Pen, les propos antisémites ont fait leur réapparition sans dissimulation.
S’y est ajouté un antisémitisme venu de certaines franges de l’ultra gauche (Rassinier, La Vieille Taupe…). Des stéréotypes contre les Juif/ves viennent aussi des quartiers populaires et de la population issue de l’immigration postcoloniale.
Aujourd’hui, les autorités réagissent immédiatement à chaque acte ou crime antisémite et les auteur·es sont pourchassé·es. Ce n’est pas le cas pour les actes racistes frappant les Noir·es, les Arabes, les Musulman·es, les Rom·es. Là, on a affaire à un racisme d’État, avec des discriminations au travail ou au logement qui aboutissent à une véritable ghettoïsation. Ces populations sont régulièrement stigmatisées par des politicien·nes, des figures des médias, des élu·es, des ministres comme étant coupables de ne pas aimer la France et la République ou comme étant des terroristes en puissance. Leurs croyances religieuses, réelles ou supposées, sont dénoncées comme incompatibles avec la laïcité. Pire, les violences ou crimes commis par la police contre ces populations restent impunies ou niées.
Tout se passe comme si le message officiel était : “le racisme, c’est permis, c’est même souhaité, mais contre les Juif/ves, c’est interdit”.
Cette situation ne protège pas du tout les Juif/ves contre l’antisémitisme, au contraire. Elle alimente les pires stéréotypes antisémites.
Les dîners du CRIF où la plupart des hommes et femmes politiques acceptent de recevoir des bons ou des mauvais points en fonction de leur allégeance à la politique de colonisation israélienne donnent une image désastreuse et choquante.
Pire, quand l’ancien n°2 du CRIF, l’avocat Gilles-William Goldnadel, spécialisé dans les procès pour antisémitisme, déclare “oui, il y a des colonies de peuplement. Pas en Judée-Samarie où les Juifs sont chez eux mais dans le 9-3” et devient l’avocat de Génération Identitaire, alors tout se brouille.
L’image du Juif/ve n’est plus associée à celle du paria victime du racisme, mais au raciste suprématiste, surtout quand on réalise que le CRIF est dirigé par un ancien du Betar[1].
Tout se brouille aussi quand, pour commémorer un des crimes majeurs commis pendant l’occupation de la France (la rafle du Vél d’Hiv), le Président Macron invite Netanyahou.
Dans ces conditions, comment lutter contre l’antisémitisme ?
Quand Leila Shahid (une diplomate palestinienne éminente), Dominique Vidal (un Juif français) et Michel Warschawski (un Juif israélien) sillonnent ensemble la France des quartiers populaires pour expliquer ce que l’occupant inflige aux Palestinien·nes et pour prôner le “vivre ensemble”, elle et ils luttent contre l’antisémitisme.
Quand soixante lycéen·nes israélien·nes annoncent publiquement qu’ils/elles n’iront pas à l’armée à cause de la “politique sioniste de violence brutale envers les Palestiniens…”, ils/elles luttent contre l’antisémitisme.
Quand les journalistes israéliens Amira Hass et Gideon Levy, dénoncent inlassablement les crimes de l’armée israélienne, ils agissent contre l’antisémitisme. Grâce à eux, quand on se présente comme juif/ve en Palestine, la réponse est “nous sommes contre l’occupation, nous n’avons rien contre les Juif/ves”.
Quand des jeunes Juif/ves des États-Unis s’engagent, au nom de leur judéité, dans le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions), ils/elles luttent contre l’antisémitisme.
Quand l’Union Juive Française pour la Paix s’engage avec des mouvements de Noir·es, de Rom·es, de Musulman·es en France, quand elle proteste contre la dissolution du CCIF, elle lutte contre l’antisémitisme. Quand ses militant·es interviennent dans les quartiers sur la Palestine et/ou sur le racisme et qu’on leur dit “on ne savait pas qu’il y avait des Juif/ves comme vous”, ils/elles luttent contre l’antisémitisme.
Quand les paysan·nes de Gaza, avec l’argent d’une souscription menée par l’UJFP, construisent un château d’eau pour pouvoir vivre de leurs récoltes et nourrir leur population et inscrivent en haut UJFP, l’antisémitisme recule.
La guerre du Proche-Orient et l’antisémitisme
Au moment de la fondation de l’UJFP (1994), une des préoccupations principales, était “pas de crimes en notre nom”. Peut-on passer outre, ne pas se préoccuper de ceux/celles qui prétendent parler au nom des Juif/ves, affirmer qu’aucun Juif/ve ne doit être assigné·e à l’obligation d’avoir à se prononcer sur Israël/Palestine ?
Il était sans doute encore possible de faire abstraction de cette guerre au moment de la profanation du cimetière de Carpentras (1990). Ce n’est plus possible aujourd’hui. À chaque crime antisémite, les drapeaux israéliens sont sortis dans les manifestations.
On aimerait sûrement que, dans l’esprit de notre population, l’image des Juif/ves soit rattachée aux générations qui ont précédé, se battant pour obtenir l’égalité des droits et objets d’une persécution millénaire.
Elle est aujourd’hui aussi rattachée à un État raciste coupable de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
Nous pouvons observer que des familles de victimes de crimes antisémites en France ne pensent pas que ce qui se passe au Proche-Orient soit étranger à ce qui se passe en France. La famille d’Ilan Halimi l’a fait inhumer à Givat Shaul. Il y a pourtant des carrés juifs dans beaucoup de cimetières français. Givat Shaul tout près de Jérusalem, c’est le même territoire que Deir Yassin, là où toute la population palestinienne a été massacrée le 9 avril 1948. Quel symbole : la victime d’un crime antisémite enterré près du village emblématique du nettoyage ethnique de 1948. Et pour les enfants et l’enseignant massacrés par Mohammed Mérah à Toulouse en 2012, Le Parisien titrait : “Les corps des victimes de Toulouse rapatriés vers Israël”.
Ensemble contre le racisme et le suprématisme sous toutes ses formes
En France, les digues nous protégeant du racisme ont rompu. Rassemblement National, “Les Républicains” et partisan·es de Macron rivalisent pour savoir qui sortira le propos le plus haineux contre “l’autre”, “l’inassimilable”. Un grand journal (Le Figaro) lance à la chasse aux “islamo-gauchistes qui gangrènent l’université” et il est aussitôt repris par une ministre (Frédérique Vidal). La stigmatisation des musulman·es est devenue un passage obligé pour gagner une élection et un ministre de l’Intérieur tente de déborder Marine Le Pen sur sa droite.
Les crimes racistes, notamment commis par les forces de l’ordre, se multiplient et ils restent toujours impunis, les cas les plus emblématiques (parmi beaucoup d’autres) étant Adama Traoré et Zineb Redouane.
La place de la lutte contre l’antisémitisme est au côté de ces victimes, à l’image de ce qui se passe aux États-Unis où le mouvement “Black Lives Matter” a su fédérer toutes les luttes contre le racisme.
Lutter contre l’antisémitisme sans poser la question de la guerre menée contre les Palestinien·nes est contre-productif. C’est se désarmer face à l’instrumentalisation de l’antisémitisme par les sionistes.
Isoler la lutte contre l’antisémitisme des luttes contre toutes les autres formes de racisme, c’est aussi contre-productif, c’est donner l’impression qu’on demande une exception pour les Juif/ves.
Au contraire, la lutte contre l’antisémitisme doit retrouver l’universalisme de l’époque où une majorité de Juif/ves considéraient que leur émancipation, comme minorité opprimée, passait par l’émancipation de toute l’humanité.
Pierre Stambul
[1] mouvement de jeunesse juif radical, sioniste.