George Floyd
L’assassinat de George Floyd par le policier Derek Chauvin le 25 mai est devenu un événement planétaire parce qu’une jeune fille de 17 ans a filmé la scène. Aux États-Unis comme en France, sans vidéo, la version policière est toujours la bonne. Cet assassinat, alors que le mouvement “Black lives matter” est en plein essor a provoqué une lame de fond. Dans certains quartiers, la police, déconsidérée, n’a plus les moyens d’intervenir. Trump n’a pas réussi à faire jouer “la loi et l’ordre”. Les Noir·es américain·es réalisent que, des décennies après les assassinats de Martin Luther King, Malcolm X et les exécutions sommaires des dirigeants des Black Panthers, rien n’a vraiment changé.
Cette colère a poussé Joe Biden a choisir pour vice-présidente Kamala Harris qui a une mère indienne et un père jamaïcain. Cela suffira-t-il à pousser les Noir·es à aller voter ? Ce n’est pas sûr. Biden a eu des propos pour le moins confus sur les Noir·es. Sur la politique étrangère, c’est pire. Après avoir approuvé le déménagement de l’ambassade états-unienne à Jérusalem, il vient d’approuver la reconnaissance d’Israël par les Émirats Arabes Unis.
Liban
La catastrophe de Beyrouth intervient sur fond de faillite totale du pays. Depuis la fin de la guerre civile, six chefs de guerre se partagent le pouvoir : d’un côté Hassan Nasrallah, Michel Aoun et Nabih Berri, de l’autre Samir Geagea, Walid Joumblatt et Saad Hariri, les camps étant caractérisés par leurs alliances internationales. Comme le premier camp est actuellement dominant et qu’il comprend le Hezbollah pro-iranien, les richissimes féodaux du Golfe ont retiré leurs avoirs. Les banques qui prêtaient sans limite dans un pays où 90 % de ce qui est consommé est importé se sont écroulées et la monnaie avec. Plus de 50 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. La catastrophe a emporté les stocks de nourriture, de médicaments et de carburant. La population n’en peut plus de ce système confessionnel mafieux et de cette entente entre coquins. Elle aspire à la laïcité et la gauche libanaise relève la tête.
Heureusement, docteur Macron est là : il est venu expliquer qu’il fallait faire confiance au FMI. Semblant ignorer que le Liban n’est plus une colonie française, il a multiplié les conseils. En fait, il est inquiet que le Liban en faillite ne puisse plus acheter les armes et les équipements de répression made in France.
Macron et le FMI font miroiter aux Libanais une “reconstruction” qui pourrait être pire que celle qui a suivi la guerre civile. L’argent avait été essentiellement volé par la mafia avec des privatisations colossales qui ont tué ce qu’il restait de service public. À Beyrouth, une énorme partie du bord de mer a été privatisée.
À l’heure où ces lignes sont écrites, le plus ancien prisonnier politique détenu en Europe (36 ans d’incarcération), le communiste libanais Georges Ibrahim Abdallah, est toujours dans la prison de Lannemezan.
Erdogan
La transformation de Sainte-Sophie en mosquée est révélatrice de la nature du régime de plus en plus dictatorial d’Erdogan. La Turquie kémaliste était nationaliste et militariste. Erdogan aussi : il a envoyé ses troupes en Syrie et en Libye. Il patrouille en mer Égée et continue de martyriser le Kurdistan turc. Mais il y ajoute un cléricalisme de plus en plus intégriste.
Bien sûr, les Chrétien·nes ont aussi transformé (autrefois) les mosquées de Cordoue ou Séville en cathédrales. Et les intégristes hindous ont dynamité en 1992 la mosquée d’Ayodhya.
Ces tentatives d’essayer de “purifier” un territoire en niant la mémoire et l’existence de “l’autre” sont extrêmement dangereuses. L’initiative d’Erdogan pourrait donner des idées à l’extrême droite israélienne qui rêve de démolir l’esplanade des mosquées pour y construire “le Temple”.
BHL
La visite de ce non-philosophe en Libye aurait dû être un non-événement. Souvenons-nous qu’en 2011, il faisait partie de ces pseudo-intellectuels poussant le “monde libre” à “installer la démocratie” en Libye. Le résultat a été tragique : une guerre civile inextricable, un pays transformé en camp de concentration pour migrant·es et le Sahel déstabilisé, ce qui donne le prétexte à l’armée française pour venir à nouveau “rétablir la démocratie”.
On se souviendra de BHL essayant en vain, en 2011 à Benghazi, de monter sur la tribune avec Cameron et Sarkozy venus célébrer la victoire de leurs troupes néo-coloniales sur celles du tyran.
Cette fois, BHL a essayé de visiter Misrata, à l’invitation d’un chef de guerre local. Il s’est fait injurier et menacer, une manifestation a eu lieu contre lui à Tripoli et il a dû partir précipitamment. Ces Libyen·nes sont vraiment des ingrats !
Israël
Les crimes gratuits commis contre la population palestinienne ne cessent pas. Un jeune de Tulkarem a été écrasé par un colon. Une jeune femme a été assassinée à Jénine, une enfant de quatre ans est morte de ses blessures à Jérusalem. Les bombardements sur Gaza ont repris, une école a été détruite. Les démolitions de maisons à Jérusalem et dans les villages bédouins se multiplient. La répression s’abat sur celles et ceux qui résistent : l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri a été (une nouvelle fois) emprisonné une semaine en juillet. En août, c’était le tour de Mahmoud Nawaja’a, coordinateur du BDS en Cisjordanie. Aucune raison donnée, la “détention administrative” permet toutes les formes d’arbitraire.
À Tel-Aviv, les manifestations contre Nétanyahou ne cessent pas, mais c’est sa corruption et sa gestion de la crise sanitaire qui sont visées, pas ce qui est infligé à la Palestine. En France, il y a eu plusieurs manifestations contre le projet d’annexion le 27 juin.
La reconnaissance d’Israël par les Émirats Arabes Unis est une conséquence du plan Trump. C’est un coup de poignard de plus dans le dos des Palestinien·nes de la part de ces féodaux esclavagistes et ultralibéraux qui n’hésitent plus à exiger une capitulation des Palestinien·nes. Le fait qu’Israël n’ait pas encore déclaré officiellement l’annexion de la Cisjordanie est un point formel, cette annexion existe déjà dans les faits.
Joe Biden et Emmanuel Macron ont salué le roi des Émirats. Il n’est pas possible d’ignorer dans quel camp ils sont.
Et pourtant, pour l’instant la société palestinienne ne s’effondre pas. À nous de les soutenir.
Pologne
La droite cléricale et nationaliste a conservé de justesse la présidence de la république (51 % contre 49 %). Le maire de Varsovie a fait le plein de toutes celles et ceux qui refusent un parti dont les “valeurs” rappellent les heures noires de la Pologne. Mais cette opposition est “libérale” et pro-européenne (comprendre qu’elle soutient à fond l’Europe libérale). Ce n’est pas vraiment une alternative.
Juan Carlos
Dans les années 70, le franquisme vivait ses dernières années de pouvoir. Successeur désigné de Franco le fasciste Carrero Blanco avait été exécuté par l’ETA dans un attentat en 1973, sa voiture étant projetée sur un toit par l’explosion. Dans les manifestations, on chantait “Et hop, Juan Carlos, plus haut que Carrero” puisque ce personnage avait été nommé successeur du dictateur. On retiendra que les principaux partis de gauche avaient renoncé à la République et reconnu ce roi post-fasciste.
50 ans plus tard, il n’est plus roi, mais on découvre chaque jour l’énormité des fonds qu’il a détournés. Il s’est enfui à Saint-Domingue.
Pierre Stambul